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ensuite que la disposition législative dont l'extensibilité à un autre objet est mise en question, ne soit pas une aberration de droit, et qu'elle se trouve au contraire en harmonie avec les principes généraux de la matière qu'elle régit.

Commençons par supposer que la première de ces deux conditions se rencontre ici, c'est à-dire, qu'il y a une analogie parfaite entre la déclaration de la défensibilité des bois grevés de droits de Pâturage, et le nombre des bestiaux que les usagers peuvent introduire dans ces bois; et bornons nous, pour le moment, à examiner si la raison de droit s'accorde bien avec la disposition de l'avis du conseil d'etat du 18 brumaire-16 frimaire an 14 qui déclare que les administrateurs généraux des forêts tiennent la place des grands-maitres, et qu'à ce titre, ils sont, exclusivement à toute autre autorité, compétens pour prononcer, non seulement sur la défensabilité des bois de l'état, mais encore sur celle des bois des particuliers; ou si, au contraire, elle n'est qu'une décision arbitraire, anomale, et en opposition directe avec le système général de la législation fores tière.

D'abord, comment peut-elle dire que les administrateurs généraux des forêts tiennent la place des grands-maitres? Ils tiennent bien la place du conseiller d'état ou maitre des requêtes qui, en 1789, correspondait, sous l'autorité du ministre des finances, avec les grands-maitres pour la partie purement administrative dont ils étaient charges. Mais, d'un côté, par qui les grands-maitres sont-ils aujourd'hui remplacés, quant à cette partie? Par les conservateurs, uniquement par les conservateurs. Les administrateurs généraux des forêts ne remplacent à cet égard que le conseiller d'état ou maitre des requêtes dont je viens de parler; ils ne sont, à cet égard, que ce qu'aurait été la conservation générale instituée par la loi du 29 septembre 1791, si cette institution eût été mise en activité, si la loi du 11 mars 1792 n'eût pas apposé à la nomination des membres de la conservation générale, un sursis qui n'a jamais été levé.

En second lieu, en quel sens les conservateurs institués par la loi du 29 septembre 1791, et mis en activité par celle du 16 nivóse an g, tiennent-ils la place des grandsmaîtres? En ce sens qu'ils sont charges, sous la surveillance de l'administration forestière, comme les grands-maitres l'étaient, sous la surveillance d'un conseiller d'état ou maitre des requêtes, d'un grand nombre d'opéra

tions purement administrativès, absolament indépendantes de la juridiction des tribunaux forestiers.

Mais la déclaration de la défensabilité des bois de l'Etat l'était-elle au nombre de ces opérations? Pour qu'elle y eût été, il aurait fallu qu'elle eût toujours été, de la part des grandsmaitres, un acte purement volontaire; il aurait fallu que les grands maîtres eussent eu le pouvoir discrétionnaire de l'accorder ou de la refuser. Or, bien certainement les grands-maitres n'avaient pas ce pouvoir. Il était rare sans doute que l'exercice qu'ils faisaient de leur droit exclusif de déclarer les bois défensables, donnát lieu à des contestations; mais enfin leur refus de déclarer défensable un canton de bois que les usagers prétendaient être dans le cas d'être déclaré tel, pouvait motiver de justes réclamations; et les usagers avaient, pour s'en plaindre, la voie d'appel aux tribunaux institués pour réformer les ordonnances de ces officiers.

La déclaration de la défensabilité des bois de l'état était donc, comme je l'ai déjà dit, de la part des grands-maitres, un acte de juridiction proprement dit ; et de là suit nécessairement la conséquence qu'elle est retombée de plein droit, par l'abolition des grandes maitrises, dans le domaine des tribunaux ordinaires, aujourd'hui substitués aux tribunaux forestiers.

Aussi la loi du 29 septembre 1791 ne l'avait elle attribuée, ni aux conservateurs comme représentant les grands- maitres dans la partie purement administrative de leurs fonctions, ni à la conservation générale des foréts.

Qu'elle ne l'ait point attribuée aux conservateurs, c'est ce que j'ai établi plus haut,

no. 3.

Qu'elle ne l'ait pas attribuée à la conservation générale des forêts, c'est ce qui résulte du silence absolu que garde là-dessus le tit. 8 de cette loi, lequel a pour rubrique, fonetions des commissaires de la conservation générale.

Elle l'avait donc laissée, par cela seul, dans le domaine des tribunaux, en les astreignant toutefois, par l'art. 9 de son tit. 6, à n'y statuer que sur le vu des indications fournies et des vérification faites par les

conservateurs.

Et dès lors, impossible de ne pas reconnaitre que c'est par la plus étrange des innovations, par une dérogation arbitraire aux lois existantes, que, tout en paraissant se borner à les interpréter, l'avis du conseil d'état du 18 brumaire-16 frimaire an 14 déclaré l'admi

nistration forestière seule compétente pour déclarer les bois défensables.

Que cela soit plus commode, plus expéditif, et que, dans la pratique, il n'en soit encore resulté aucun inconvenient, à la bonne heure; mais ce n'était pas une raison pour attribuer, par forme d'interprétation, à une branche de l'administration générale, un pouvoir qui, de sa nature, est judiciaire, et qu'elle ne pouvait tenir que de la loi.

A-t-on bien réfléchi d'ailleurs aux conséquences qui peuvent résulter de cette attribution? Que l'administration forestière, trom pée par ses agens, se refuse à déclarer defensable un canton de bois qui l'est réellement, quelle sera la ressource des usagers? Ils n'en auront pas d'autre que de se pourvoir contre son refus. Et où se pourvoiront-ils ? Devant le ministre des finances, et s'il y a lieu, devant le conseil d'état. Ainsi, le ministre des finances et le conseil d'etat deviendront juges d'une contestation qui, par la nature de son objet, est essentiellement du ressort des tribunaux! Quelle inconséquence! Quelle confusion!

Troisièmement, quand on supposerait, avec l'avis du conseil d'etat du 18 brumaire-16 frimaire an 14, que l'administration forestière tient la place des grands-maitres, et qu'en conséquence ce n'est pas arbitrairement, mais en se fondant sur les lois existantes, qu'il lui defère exclusivement le droit de déclarer les bois de l'etat defensables, cet avis en serait-il plus d'accord avec le système général de la legislation forestière, en tant qu'il applique sa decision aux bois des particuliers ?

Sans doute, si l'administration forestière tient, par rapport aux bois des particuliers, la place des grands-maitres, elle a, relativement à ces bois, les mêmes attributions qu'eux; mais elle n'en a point, elle ne peut point en avoir d'autres.

Or, quelles étaient, relativement à la déclaration de la défensabilité des bois des particuliers, les attributions des grands-maitres? Ces officiers avaient-ils à cet égard un droit exclusif? Étaient-ils seuls competens pour la prononcer, comme ils l'étaient seuls pour prononcer celle des bois de l'Etat? Non, certainement non ils n'avaient, à cet égard, que la prévention sur les juges ordinaires; et ce droit de prevention, ils ne pouvaient l'exercer que sur la réquisition des particuliers, propriétaires de bois.

Comment, dès lors, concevoir cette manière de raisonner : « l'administration fores» tière tient la place des grands-maitres. Or,

» les grands-maîtres pouvaient déclarer dé»fensables les bois des particuliers, mais » par prevention seulement, et seulement » dans le cas où ils en étaient requis par les » propriétaires. Donc l'administration fores»tière a, dans tous les cas, le droit exclusif » de déclarer ces bois defensables; donc elle » peut exercer ce droit, même sans en être > requise par les propriétaires, et sur la » seule requisition des usagers »? On ne peut certes rien imaginer de plus inconséquent. Et c'est pourtant ainsi qu'a nécessairement raisonné le conseil d'etat pour arriver au résultat qu'il a adopté relativement aux bois des particuliers, et d'après lequel la cour de cassation s'est vue forcée de décider, par son arrêt déjà cité du 25 mai 1810, que le droit de déclarer l'époque à laquelle les bois des particuliers sont défensables, appartenaient exclusivement aux administrateurs généraux des forêts, les usagers des bois des particuliers ont la faculté de s'adresser, pour cet effet, à l'administration forestière.

Mais cette manière de raisonner paraîtra bien plus étrange encore, si l'on réfléchit que, même en supposant l'administration forestière investie de toutes les attributions juridictionnelles des grands-maitres par rapport aux bois de l'Etat, on ne pourrait pas encore, d'après la legislation sous laquelle a été rendu l'avis du conseil d'état, la regarder comme compétente pour déclarer defensable le bois d'un particulier qui lui en ferait la requisition expresse.

En effet, l'art. 7 de la loi du 7-11 septembre 1790, concernant l'organisation judiciaire, après avoir dit « qu'en matière d'eaux » et forêts, la conservation et l'administra» tion appartiendront aux corps qui seront » indiques incessamment; qu'il sera statue » de plus sur la manière de faire les ventes » et adjudications des bois; que les actions » pour la punition et réparation des délits » seront portées devant les juges ordinaires », ajoute que ces juges auront aussi l'exécution des réglemens concernant les bois des particuliers.

Or, parmi les réglemens concernant les bois des particuliers, se trouve éminemment celui qui, relativement à la déclaration de la défensabilité de ces bois, résulte, comme on l'a vu plus haut, no. 3, des art. 5 et 28 des tit. 26 et 32 de l'ordonnance de 1669, c'est-à-dire, celui qui veut que les usagers des bois des particuliers ne puissent y introduire leurs bestiaux qu'après que la défensabilité en a été dùment déclarée.

Donc c'est aux juges ordinaires que la Joi

du 7.11 septembre 1790 défère l'exécution de bestiaux à mettre dans les bois ? Non, non;

ce réglement.

Donc c'est à eux et à eux seuls que cette loi attribue le pouvoir de déclarer les bois des particuliers défensables.

Eh! à quel degré d'évidence n'est pas portée cette conséquence par la loi du 29 septembre 1791? Les cinq premiers articles du tit. rer. de cette loi commencent par declarer que les bois dépendans du domaine de l'Etat, feront l'objet d'une administration particulière, et que les bois tenus de ce domaine, soit à titre d'engagement, soit à titre d'usufruit, les bois possédés en gruerie, grairie, segrairie, tiers et danger, les bois indivis entre l'État et des communautés, les bois communaux, les bois possédés par les maisons d'éducation et de charité, par les établis semens de main-morte étrangers et par l'ordre de Malthe, seront soumis à la méme administration. Puis, l'art. 6 ajoute : les bois appartenant aux particuliers, CESSERONT D'Y ÊTRE SOUMIS, et chaque propriétaire sera libre de les administrer et d'en disposer à l'a venir comme bon lui semblera.

Cet article est, il est vrai, modifié par la loi du 9 floréal an 11, en ce qu'elle défend aux particuliers, proprietaires de bois, de les défricher pendant vingt ans, sans l'autorisation du gouvernement et d'y abattre aucun arbre futaie avant d'en avoir prévenu l'administration forestière; mais elle ne l'est qu'en ces deux points; et hors ces deux points, l'administration forestière n'a rien, absolument rien, à voir ni à faire dans les bois des particuliers.

Les administrateurs généraux des forêts sont donc, aux termes précis de la loi du 29 septembre 1791, non abrogée ni modifiée par aucune autre, sans qualité pour déclarer les bois des particuliers defensables, lors même qu'ils en seraient requis par les propriétaires.

Et cependant l'avis du conseil d'état du 18 brumaire-16 frimaire an 14 décide que, d'après les lois existantes, c'est à eux qu'appartient, non-seulement par prevention avec les juges ordinaires, mais même exclusivement à toute autre autorité, le droit de prononcer sur la défensabilité de ces bois! Il est impossi ble de heurter plus directement les lois que l'on fait semblant d'interprêter.

Et c'est d'une décision aussi incohérente sous tous les rapports, c'est d'une décision à laquelle des écarts aussi nombreux, aussi frappans, impriment le sceau de l'erreur la plus manifeste, que l'on voudrait argumenter pour établir que l'administration forestière est competente pour régler le nombre des

c'est ici ou ce ne sera jamais le cas de dire avec les législateurs romains : quod contrà rationem juris introductum est, non est producendum ad consequentias.

Mais jusqu'à présent nous avons supposé qu'il existe une analogie parfaite entre l'objet qui nous occupe ici et celui que règle l'avis du conseil d'état du 18 brumaire 16 frimaire an 14. Que serait-ce donc si ce n'était là qu'une supposition gratuite, et si, au lieu d'une parfaite analogie entre la déclaration de la défensabilité des bois grevés de droits de Pâturage, et la fixation du nombre des bestiaux qui peuvent y être introduits sans les endommager, on ne trouvait, entre l'une et l'autre qu'une grande disparité? Ce serait, sans contredit, une nouvelle raison, et une raison invincible, pour restreindre dans ses termes précis la disposition de l'avis du conseil d'état du 18 brumaire-16 frimaire an 14 qui attribue la première à l'administration générale des forêts, et ne pas l'étendre à la seconde, même en mettant à part tous les vices de logique, tous les excès de pouvoir qui la defigurent.

Eh bien! qu'y a-t-il de commun entre l'une et l'autre opération?

L'une porte sur un fait toujours simple, toujours facile à vérifier; il est rare qu'elle soit contredite, plus rare encore qu'elle soit susceptible de l'être avec fondement; et c'est sans doute par cette considération que, dans l'avis du conseil d'état de l'an 14, on a cru pouvoir, pour en faire un acte de pure administration forestière, passer au-dessus des principes et des lois qui l'avaient jusqu'alors placée dans la catégorie des actes de veritable juridiction.

L'autre, au contraire, est presque toujours sujette à litige, parcequ'elle dépend de divers élémens sur chacun desquels il est extrêmement rare que les parties intéressées soient d'accord: et c'est dejà un motif bien suffisant pour la laisser sous la juridiction des tribunaux. Mais il y a plus : elle tient immédiatement au plus ou moins d'étendue que doit avoir la servitude de Paturage dans les bois d'autrui; or, n'en est-il pas. à cet égard, de la question de savoir quelle est l'étendue d'une servitude, comme de celle de savoir si une servitude existe ou n'existe pas? Et si les tribunaux sont incontestablement compétens et seuls compétens pour connaître de la seconde (1), comment ne le seraient-ils pas éga

(1) V. l'article Usage (droll d'), S. 4, no. a.

lement pour connaître de la première (1)? Il ne peut s'élever là-dessus aucun doute raisonnable même par rapport aux bois de l'Etat, mais la chose est encore plus claire pour les bois des particuliers. On a déjà vu que l'art. 7 de la loi du 7-11 septembre 1790 veut que l'exécution des réglemens concernant les bois des particuliers, appartienne aux juges ordinaires. Il veut donc que les juges ordinaires connaissent seuls de l'exécution

du réglement résultant, pour les bois des particuliers, de la combinaison de l'art. 5 du tit. 19 de l'ordonnance de 1669 avec les art. 5 et 28 des tit. 16 et 32 de la même loi, c'est-à-dire, du réglement qui permet aux particuliers de faire limiter le nombre des bestiaux à mettre en Pâturage dans leurs bois par les usagers; et par une conséquence nécessaire, il veut que ce nombre ne puisse, en cas de contestation, être fixé que par les juges ordinaires.

En résumé, tout s'élevait contre l'opposition des héritiers du duc de Bouillon à la décision du ministre des finances du 5 novembre 1823; et il était impossible qu'elle fût accueillie. Cette décision aurait sans doute pu être mieux motivée qu'elle ne l'est; mais au fond, elle est parfaitement juste; et quoiqu'elle ne porte que sur les bois des particuliers, elle n'en doit pas moins servir de règle pour les bois de l'Etat.

XXI. Le Pâturage dans les parties dépeuplées des forêts, est-il soumis aux mêmes regles, et en cas de contravention, aux mêmes peines, que s'il avait lieu dans les parties plantées d'arbres?

M. Sirey (2) et les continuateurs de Denevers (3) rapportent, comme adoptant, d'une maniere absolue, l'affirmative, un arrêt rendu par la cour de cassation, le 26 avril 1816, entre l'administration forestière et la commune de Soissons, arrondissement de Dijon. Mais on va juger s'ils n'en font une application trop generale.

En mai 1815, procès-verbal qui constate que le patre de la commune de Soissons a été trouvé faisant paitre le troupeau commun des habitans dans les cantons du bois communal, appeles Marres-Chrétiennes, faisant partie des coupes ordinaires des nos. 22 et 23 de l'aménagement de ce bois; que les 80 vaches

(1) V. lbid. §. 5, art. 7.

(2) Jurisprudence de la cour de cassation, tome 20, partie 1, page 520.

(3) Journal des Audiences de la cour de cassation, année 1816, page 441.

qui sont sous sa garde, ont brouté, sur ce terrain, environ 250 torches de bois essence de verne, crues d'un an; et qu'il a déclaré le faire en vertu d'une autorisation du maire et du conseil municipal.

La commune de Soissons est en conséquence citée, à la requête de l'administration des fotêts, devant le tribunal correctionnel de de Dijon, pour être, conformément à l'art. 38 du tit. 2 de la loi du 10 octobre 1791, condamnée à une amende calculée sur le nombre et la qualité des bestiaux trouvés en délit.

Le 10 août 1815, jugement qui considère que, de l'aveu même de l'inspecteur forestier, présent à l'audience, les Marres-Chrétiennes sont dépeuplées depuis long-temps; qu'à la vérité, il y croit encore quelque torches de vernes, mais que de pareilles productions ne peuvent pas faire regarder ces cantons comme des bois; qu'on ne peut donc les assimiler qu'à des prés; qu'ainsi, en y conduisant le troupeau commun des habitans, le pátre ne peut avoir commis qu'un délit rural; et en conséquence, évaluant le dégat par approximation, ne condamne la commune de Soissons qu'à douze francs d'amende et aux dépens.

L'administration des forêts appelle de ce jugement à la cour royale de Dijon, qui, par arrêt du 6 mars 1816, en adopte les motifs et le confirme.

Mais sur son recours en cassation, arrêt du 26 avril suivant, au rapport de M. Basire, qui,

« Vu l'art. 38 de la loi du 28 septembre6 octobre 1791...;

» Attendu qu'il était constaté, dans l'espèce, par un procès-verbal non argué de faux, que les cantons en litige sont enclavés dans un bois dont la commune de Soissons est propriétaire; qu'ils font partie des coupes ordinaires des nos. 22 et 23 de l'aménagement de ce bois; qu'il y existe des bois essence de verne, et que 250 torches de ces bois, crues d'un an, avaient été broutées par 80 vaches appartenant aux habitans de ladite commune; que, dès lors, il y avait lieu d'appliquer aux prévenus l'art. 38 de la loi du 28 septembre 1791; que cependant l'arrêt attaque n'a prononcé qu'une amende bien inférieure à celle qui est déterminée par ladite loi; que le motif de cette modération a été qu'il était avoué que les cantons dont il s'agit, étaient en nature de près, et que, dès lors, les prévenus n'étaient coupables que d'un délit rural, sus ceptible seulement d'une amende appréciée d'après le dommage occasioné par ce delit; » Attendu que cet aveu ni les considerations qu'on en a déduites, n'ont pu détruire

le fait constaté par le procès-verbal, et reconnu d'ailleurs par les prévenus eux-mêmes, dans leur écrit du 16 juillet 1815, que les susdits deux cantons faisaient partie des cou pes ordinaires du bois où ils sont enclaves; d'où il suit la conséquence nécessaire, qu'ils sont assujetis au même régime que le surplus du bois; que les délits qui sont commis sur le bois y existant, sont des delits forestiers, sus ceptibles des peines forestières; et qu'en ne prononçant pas ces dernières peines, il a été contrevenu formellement, par l'arrêt attaqué, à l'art. 38 précité de la loi du 28 septembre 1791;

» La cour casse et annulle.... ».

Il est aisé de voir que cet arrêt ne juge qu'une seule chose, savoir, que le dépeuple ment d'un canton de bois n'empêche pas que ce canton ne soit, quant aux règles du Pâturage, considéré comme faisant toujours partie intégrante de la forêt dans laquelle il est enclavé, lorsqu'il produit encore du bois d'une essence quelconque, et qu'il continue d'être compris dans l'aménagement des coupes or dinaires.

La cour de cassation aurait-elle prononcé comme elle l'a fait, si les Marres-Chrétiennes n'eussent plus produit aucune espèce de bois, et qu'en conséquence elles eussent été distraites de l'aménagement de la forêt communale de Soissons? Le texte même de son arrêt parait évidemment prouver que non.

XXII. On a vu à l'article Amende, §. 1, no. 2, de quelles peines l'ordonnance de 1669 punit ceux qui introduisent illégalement

leurs bestiaux dans les bois de l'Etat.

A-t-il été dérogé aux dispositions de cette loi, par celles de la loi du 28 septembre 6 octobre 1791, qui concernent le Pâturage illégal dans les bois taillis des communes et des particuliers?

Un arrêt de la cour d'appel de Toulouse, du 19 mars 1812, avait jugé pour l'affirmative en faveur de Jean Blasi et d'autres particuliers. Mais il a été cassé en ces termes, le 14 mai de la même année, au rapport de M. Bazire; « Vu les art. 10 et 8, tit. 32, de l'ordonnance de 1669;

» Attendu que la dépaissance en délit des bestiaux dans les forêts de l'Etat, n'étant prévue ni par le Code rural de 1791, ni par aucune loi spéciale, doit être punie conformé. ment à l'ordonnance de 1669; qu'il était constaté par un proces-verbal régulier, et non argue de faux, que les bœufs et vaches de Jean Blasi et autres avaient été trouvés paissant dans la forêt de l'Etat de Saurats;

» Que cependant l'arrêt attaqué n'a puni les propriétaires de ces bestiaux, que des peines déterminées dans l'art. 38, tit. 2, du Code rural de 1791;

» Que, dès lors, il a été fait, dans l'espèce, une fausse application dudit art. 38, et qu'il a été commis une contravention expresse aux art. 10 et 8 précités du tit. 32 de l'ordonnance de 1669;

» Par ces motifs, la cour casse et annulle.... ».

Aurait-on du prononcer de même, si la forêt domaniale de Saurats eût été grevée d'un droit d'usage en faveur d'une commune?

Oui, sans doute: car l'art. 38 du tit. 2 de la loi du 28 septembre 6 octobre 1791 ne porte que sur les bois des communes et des particuliers; et il est évident que, par ces mots, il entend non les bois sur lesquels des communes ou des particuliers n'ont que des droits d'usage, mais seulement les bois dont la propriété appartient à des particuliers ou à des communes.

Aussi, en cassant dans l'une des espèces rapportées ci-dessus, no. 11, le jugement du tribunal correctionnel de Carpentras qui avait renvoyé Louis et Joseph Giraudet des poursuites exercées contre eux par l'administration forestière, pour avoir introduit des bêtes à laine dans un bois défensable de la montagne de Gigondas, la cour de cassation a-t-elle ajouté aux motifs déjà transcrits de son arrêt,

« Qu'en supposant que l'art. 38 du tit. 2 de la loi du 6 octobre 1791, relatif aux dégats dans les bois taillis des particuliers et communautés, par des bestiaux ou troupeaux, fût applicable à un délit de dépaissance exercé par un troupeau de bêtes à laine, dans un quartier de montagne déclaré, par le rapport, défensable, et dès lors complanté en bois, ce n'était pas une raison pour affranchir de toute peine les individus poursuivis à raison d'un fait qui, d'après l'article même cité dans le jugement attaqué, aurait encore, dans les circonstances, le caractère d'un delit assez grave pour ne pas rester impuni;

» Mais que la commune de Gigondas ayant été déclarée par le tribunal saisi de la poursuite, n'avoir qu'un simple droit d'usage dans le bois dont il s'agit, il n'y avait pas lieu, dans l'espèce, à l'application d'une disposition de la loi faite sur les bois taillis dont la propriété appartient aux communes; que rien ne s'opposait donc à l'exécution des dispositions de l'ordonnance de 1669 ». ]]

XXIII. Est-il dû, pour délit de Pâturage dans les bois de l'Etat et dans ceux des éla

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