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de 20", pour l'effet de l'aberration, les lieux du soleil calculés sur les tables de Mayer. Il prit enfin pour arriver à la plus grande précision toutes ces précautions délicates que l'extrême discordance entre le ciel et les observations rendoit autrefois inutiles, et que les derniers efforts de l'analyse rendent aujourd'hui de plus en plus nécessaires.

Après avoir discuté, avec tout le soin qu'elles pouvoient exiger, près de cent quarante oppositions, tant pour Jupiter que pour Saturne, il leur compara les formules de M. Laplace, en conclut les élémens elliptiques des orbites des deux planètes, qu'il rectifia par la méthode des équations de condition, et construisit sur ces fondemens solides les tables de leurs mouvemens.

L'erreur de ces tables comparées avec les observations les plus modernes (1), s'est trouvée le plus souvent au-dessous de 30". Cette grande précision est due, non-seulement à la découverte importante faite par M. Laplace sur les causes des variations observées dans les mouvemens de Jupiter et de Saturne, mais encore aux connaissances profondes de l'astronome qui les a construites, et qui, dans la discussion des observations, a su tirer le parti le plus avantageux des formules du géomètre.

Les tables d'Uranus construites par le même et d'après les mêmes principes, ont été publiées peu de temps après. La découverte d'Uranus nous a déjà donné lieu d'en faire mention.

Après avoir construit les tables du soleil et des trois

(1) Les observations d'une date antérieure à 1733 ne méritent pas la même confiance, et c'est en remontant au-delà de cette époque que les erreurs surpassent quelquefois 40".

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grandes planètes supérieures, M. Delambre a voulu consacrer encore ses travaux à la sûreté des navigateurs. Les éclipses fréquentes des petits astres qui circulent autour de Jupiter peuvent souvent leur servir de guides dans leurs voyages. La comparaison de leurs calculs avec leurs observations peut leur faire connaître par la différence des temps, la différence des méridiens. Cette comparaison repose essentiellement sur les tables des satellites. Elles exigent donc la plus grande précision; l'erreur d'une minute de temps entraîneroit celle de 15' ou d'un quart de degré. Ce sont ces tables précieuses dont M. Delambre a fait présent à la navigation; elles ont remplacé celles de Wargentin, publiées en 1746, et regardées alors comme les meilleures qui eussent encore paru.

Les tables de M. Delambre, fondées sur les belles découvertes faites par M. Laplace dans le système de Jupiter, sont de beaucoup supérieures à celles de Wargentin par l'exactitude : elles remplissent plus rigoureusement les conditions qui lient ensemble les moyens mouvemens soit sidéraux, soit synodiques, des trois premiers satellites, et celles qui rendent leurs éclipses simultanées à jamais impossibles. La connaissance plus approfondie des effets produits par l'action mutuelle des quatre satellites, tant sur leurs périjoves que sur les excentricités et les positions de leurs orbites, a procuré à M. Delambre les moyens de bannir de ses tables les équations empiriques. << N'empruntant des observations comme le remarque » l'auteur même de la savante théorie des satellites de > Jupiter (1), que les données indispensables, elles ont

(1) Exposition du Système du Monde, 1ore édition, livre 4, chap. 6.

» l'avantage de s'étendre à tous les siècles, en rectifiant ces données, à mesure qu'elles seront mieux con

» nues. »

Les deux savans illustres dont nous venons de parler, se trouvent souvent associés pour concourir ensemble aux progrès de l'Astronomie, heureuse association dont ses fastes ne présentent que des exemples rares; elle nous rappelle ici de semblables liaisons formées par les sciences et l'amitié entre Kepler et Tycho, entre Newton et Halley, entre Lacaille et Clairaut.

MM. Laplace et Delambre étoient faits l'un et l'autre pour s'entendre dans un langage au-dessus du commun des hommes; tous deux étoient capables de lire et de renfermer dans l'étroit espace d'une formule algébrique les lois que la nature a données à l'Univers. Le premier, porté par son génie, s'est élevé aux plus hautes spéculations de la théorie; il a pris l'essor de Newton, a suivi les traces de l'aigle dans le ciel, et s'est élancé au-delà des espaces qu'il avoit parcourus. Le second, quoiqu'initié dans tous les secrets de l'analyse, et capable de pénétrer dans ses plus profonds mystères, s'est livré plus particulièrement à de grandes opérations pratiques. Il a mis à profit, pour l'utilité des hommes, les belles découvertes de son illustre associé, qui lui-même a souvent profité de ses travaux. Sans l'un, les bornes de la science n'eussent point été reculées; sans l'autre, la société n'eût point encore recueilli les fruits qu'elle doit attendre de ses progrès.

ARTICLE IV.

ETABLISSEMENT DU BUREAU DES LONGITUDES DE FRANCE,

ET TABLES ASTRONOMIQUES PUBLIÉES EN SON NOM.

Une nouvelle époque se présente maintenant pour le perfectionnement des tables astronomiques. Elle commence à celle de l'établissement du Bureau des longitudes, créé en France en 1795, à l'instar du Bureau des longitudes de Londres. Avant que de parler des nouvelles tables qu'il s'occupe encore à publier, je dois dire un mot de cette réunion de savans, chargée spécialement de les perfectionner, et qui joint à cette attribution celle du perfectionnement des méthodes des longitudes, de la rédaction de la Connaissance des Tems, de la publication des observations astronomiques et météorologiques.

Les hommes qui furent appelés à la former, l'illustrèrent dès son origine. Dans la première liste de ses membres parurent des noms célèbres, les deux premiers géomètres de l'Europe, MM. Lagrange et Laplace; les astronomes qui s'étoient le plus distingués par leurs travaux dans le calcul et l'observation, Lalande, Méchain, MM. Cassini et Delambre; deux navigateurs renommés par leurs voyages et leurs découvertes, M. Bougainville et Borda; un savant géographe (1) dont les travaux ont été souvent utiles à la navigation; un artiste (2), à qui l'on doit la restauration du plus grand télescope que l'on ait en France.

(1) M. Buach e.

(2) M. Caroché.

Des membres qui la composèrent à sa première formation, le plus grand nombre nous reste encore; la mort en a frappé quelques-uns, mais ils ont eu de dignes successeurs, parmi lesquels on compte M. Messier, (1) connu par la découverte d'un très-grand nombre de comètes et de beaucoup d'observations astronomiques; Fleurieu (2), à qui la navigation est redevable d'un ouvrage important pour la géographie et la vérification des horloges marines; M. Bouvard (3), émule et concurrent de M. Burg, coopérateur de M. Laplace dans ses calculs astronomiques auteur des nouvelles tables décimales de Jupiter et de Saturne, qui font partie de celles que publie aujourd'hui le Bureau des longitudes; le neveu d'un astronome célèbre, M. Lefrançais-Lalande, dont nous avons fait connoître le catalogue de 50 mille étoiles.

L'Astronomie repose encore en France sur des appuis solides; quelques jeunes adeptes s'approchent du temple d'Uranie; cependant, pour prévenir sa décadence et la maintenir dans son état actuel de prospérité, il est à desirer que cet oeil qui s'est montré si vigilant sur tous les besoins de la nation, s'arrête un instant sur les besoins futurs de la science protectrice de la navigation, et ranime pour elle l'ardeur des jeunes géomètres ; que les membres du Bureau des longitudes leur montrent toute l'étendue de la carrière honorable qu'ils ont à parcourir; qu'ils

(1) M. Messier a découvert 21 comètes et en a observé plus de 40.

(2) Voyez le voyage fait par ordre du roi en 1768 et 1769, en différentes parties du monde, etc., par M. de Fleurieu. Ce navigateur mort depuis peu, vient d'être remplacé au Bureau des longitudes, par M. de Rossel, ancien capitaine de vaisseau, rédacteur et coopérateur du Voyage d'Entrecasteaux. (3) MM. Burg et Bouvard ont partagé le prix de la première classe de l'Institut en 1800.

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