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nion opposée à cette doctrine; mais les raisons sur lesquelles cet auteur s'est appuyé, ont été solidement réfutées par Pothier, au chapitre second de la première partie de son Traité de la Communauté.

[[ Aujourd'hui, les rentes constituées sont, dans toute la France, mises au rang des meubles. V. le Code civil, art. 529.

A l'égard des offices, il n'en existe plus de vénaux, ni d'héréditaires. ]]

Les immeubles donnés ou légués à l'un des époux, par son père, sa mère ou quelque autre parent de la ligne directe ascendante, lui sont propres, de même que s'ils lui étaient échus par la succession de ces personnes, et par conséquent ils ne doivent pas entrer dans la Communauté. Mais il en est autrement des immeubles donnés par tout autre parent: ceux-ci ne sont que des conquêts qui entrent en Communauté, quand même l'époux donataire serait héritier présomptif du donateur, pourvu toutefois qu'il n'y ait rien de contraire dans le contrat de mariage ou dans la donation.

La raison de la différence est que, selon l'ordre de la nature, il n'y a que nos parens de la ligne directe ascendante qui nous doivent la succession de leurs biens; les autres ne nous la doivent pas : c'est pourquoi, lorsque ceux-ci nous font une donation, on ne peut pas dire qu'ils acquittent par anticipation la dette de leur succession, puisque leur succession n'est pas une créance pour nous.

Il y a néanmoins des coutumes, telles que celles d'Anjou et du Maine, où les donations faites à l'héritier présomptif en ligne collaterale, sont considérées comme avancement d'hoirie; et alors, les immeubles donnés sont réputés propres de succession, et par consé quent propres de Communauté.

La coutume de Paris ayant déclaré propres de Communauté les donations faites en ligne directe, on a demandé si les immeubles donnés par un enfant à son père marié, devaient être propres de Communauté à celui-ci.

d'hoirie, ou des actes qui en tiennent lieu : c'est pourquoi les immeubles ainsi donnés sont des propres, et non des acquêts, ni par conséquent des conquêts. Il est évident que tout cela ne peut s'appliquer qu'aux donations faites à l'un des époux par quelqu'un de ses parens de la ligne directe ascendante, attendu qu'il n'y a que ces donations qui soient des avancemens d'hoirie: on ne peut pas, sans blesser l'ordre naturel des choses, dire que les donations faites à l'un des époux par quelqu'un de ses enfans, soient un avancement d'hoirie : les immeubles ainsi donnes ne sont donc pas des propres, mais des acquêts, et par conséquent des conquêts qui doivent entrer dans la Communauté légale.

[Cette question s'est présentée en 1784 dans la coutume de la chatellenie de Lille. Il s'agissait de savoir si des immeubles donnés par un fils à sa mère remariée en secondes noces, et acceptés par elle sous l'autorité de son mari, étaient entrés ou non dans la Communauté, et si en conséquence ils formaient, dans la succession de l'enfant du second lit, des propres maternels pour le tout, ou s'ils y étaient propres paternels pour moitié.

On convenait que la mère, à qui la donation avait été faite, avait possédé ces biens comme acquêts de succession; mais on prétendait qu'ils lui avaient tenu nature de propres quant à la Communauté, et l'on soutenait que tel était l'esprit de la coutume de la chátellenie de Lille.

Mais, par sentence du 2 juillet 1784, six arbitres, du nombre desquels j'étais, ont unanimement décidé, après une ample discussion de la matière, que la coutume de la châtellenie de Lille était conforme au droit commun; et il a été ordonné que les biens contentieux appartiendraient, moitié aux héritiers paternels, et moitié aux héritiers maternels. ]

[[Aujourd'hui, « les donations d'immeu»bles qui ne sont faites pendant le mariage » qu'à l'un des deux époux, ne tombent point » en Communauté, et appartiennent au do» nataire seul, à moins que la donation ne » contienne expressement que la chose don» née appartiendra à la Communauté ». Code civil art. 1405. ]]

Renusson a adopté l'affirmative; et il s'est appuyé sur ce que la coutume s'est exprimée par les termes de ligne directe, sans distinguer la ligne descendante de l'ascendante. Mais il faut préférer à cette opinion l'avis de Lorsque l'un des époux rentre, durant Pothier, qui a judicieusement remarqué que, le mariage, dans la possession d'un herisi la coutume n'a point exprimé la distinction 'tage, soit par la rescision, par la résolution de la ligne directe descendante et de l'ascen- de la vente, ou par la simple cessation de dante, c'est qu'il a paru que cette disposition l'alienation qu'il en avait faite, il redese sous-entendait facilement, sans qu'il fut vient proprietaire au même titre qu'il l'etait besoin de l'exprimer. En effet, la décision de avant l'alienation, c'est-à-dire que, si l'hérila coutume n'est fondée que sur ce que les do- tage lui était propre de succession ou de nations en ligne directe sont des avancemens Communauté, il reprend la même qualité,

tout comme il redevient conquêt, s'il l'était avant d'avoir été aliéné. [[ V. mon Recueil de Questions de Droit, au mot Propre, S. 2. ]]

VI. Les fruits des héritages ou biens propres de chacun des époux, qui sont perçus et échus durant la Communauté, sont la troisieme espèce de choses qui composent la Communauté légale. Ils sont particulièrement accordés pour aider à soutenir les charges du mariage.

Ces fruits se divisent en fruits naturels et en fruits civils.

Les fruits naturels sont ceux que la terre produit et qui ont une existence physique; on les subdivise en fruits purement naturels et en fruits industriels. Les fruits purement naturels sont ceux que la terre produit sans culture, comme l'herbe des prés, les noix, les pommes, les poires que produisent les arbres les fruits industriels sont ceux que la terre ne produit qu'autant qu'on la cultive: tels sont les bleds, les avoines, les scigles, les orges, etc.

:

Les fruits civils sont ceux qui n'ont qu'une existence morale tels sont les fermages des métairies, les loyers des maisons, les arrérages des rentes, les droits seigneuriaux, etc.

Les fruits naturels, de quelque espèce qu'ils soient, sont acquis à la Communauté, lorsqu'ils ont été perçus avant qu'elle fût dis

soute.

Ces fruits sont censés perçus aussitôt qu'ils ne sont plus attachés à la terre qui les a produits; ainsi, dans le cas où les bleds produits par les héritages propres de l'un des époux, auraient été moissonnes le matin, et que cet époux vint à mourir le soir, ils appartiendraient à la Communauté, quand même ils n'auraient pas été enlevés, parcequ'ils auraient été séparés de la terre tandis que le défunt vivait encore, et que par conséquent la Communauté subsistait.

Quoique les fruits des biens propres des époux soient accordés à la Communauté pour soutenir les charges du mariage, ce n'est cependant pas à proportion du temps que la Communauté a supporté ces charges, que ces fruits lui appartiennent; car si la récolte des fruits de l'héritage de l'un des époux s'est faite immédiatement après la bénédiction nuptiale, elle appartient en entier à la Communauté, quand même le mariage n'aurait duré que trois ou quatre jours.

Cette décision s'étend même au cas où les fruits perçus immédiatement après le maria ge, seraient le produit de plusieurs années.

Supposez, par exemple, qu'à l'instant où la Communauté commence, il se soit fait une coupe de bois dans un taillis qui ne se coupe que tous les quinze ans, et qui est propre à l'un des époux ; cette coupe appartiendra à la Communauté, quelque peu de temps que le mariage ait duré.

D'un autre côté, si le mariage a duré plusieurs années sans qu'il y ait eu aucune coupe faire dans ce taillis, la Communauté venant à se dissoudre, n'aura rien à prétendre dans la coupe qui devra se faire postérieurement.

[[Remarquez cependant, avec le Code civil, art. 1403, que, « si les coupes de bois » qui, en suivant les règles expliquées (au » mot Usufruit), pouvaient être faites durant

la Communauté, ne l'ont point été, il en >> sera dù récompense à l'époux non pro» priétaire du fonds ou à ses heritiers ». ]]

Comme il n'y a que les fruits des propres perçus durant le mariage, qui appartiennent à la Communauté, ceux que les époux ont perçus avant d'être mariés, entrent bien dans la Communauté; mais c'est en qualité d'effets mobiliers, et non en qualité de fruits.

Quant aux fruits qui n'étaient point sépa rés de la terre lors de la dissolution de la Communauté, et qui n'ont été perçus que postérieurement, ils n'entrent point dans la Communauté, et ils appartiennent en entier à l'époux propriétaire de l'héritage ou à ses héritiers, à la charge toutefois de payer la moitié des frais de culture. C'est ce que décide l'art. 231 de la coutume de Paris, qui forme à cet égard le droit commun.

Observez, sur cette matière, que, si le mari voyant sa femme attaquée d'une maladie mortelle, differait de recueillir les fruits de son heritage propre, afin de les percevoir en entier après la dissolution de la Communauté; les héritiers de la femme seraient fondés à demander part dans cette récolte, comme ayant été retardée en fraude du droit de Communauté. Tel serait le cas où le mari n'aufait la coupe d'un bois taillis dans l'année qu'on avait coutume de la faire. [[ Code civil, art. 1403. ]]

rait pas

Et si le mari avait recueilli les fruits de l'héritage propre de sa femme avant qu'ils fussent mûrs, parcequ'il la voyait à l'extrémité, les héritiers de celle-ci seraient en droit de prétendre contre lui des dommages et intérêts.

Quant aux fruits civils, il n'entre dans la Communauté que ceux qui ont été produits pendant qu'elle subsistait ceux qui ne sont produits qu'après qu'elle est dissoute, appar

tiennent à l'époux propriétaire de la chose qui les a produits.

Ces sortes de fruits sont censés produits, lorsqu'ils commencent à être dus.

Il suit de cette règle, que les fermages étant le prix des fruits recueillis sur l'héritage affermé, et le fermier ne les devant qu'a près la récolte, ils n'entrent dans la Communauté qu'autant que la récolte s'est faite ou a dû se faire avant la dissolution de la Communauté. Si elle s'est dissoute pendant la récolte, les fruits se divisent; et la valeur en doit entrer dans la Communauté, à proportion de ce qu'il y en avait de recueillis lorsqu'elle a cessé de subsister.

Pareillement, lorsqu'un héritage qui produit différentes sortes de fruits, a été affermé pour une certaine somme par année, et que la Communauté s'est dissoute après la récolte d'une sorte de fruits et avant celle des autres sortes, on ne peut attribuer à la Communauté que le prix de l'espèce de fruits recueillie, lequel doit se régler par estimation relativement au prix total de la ferme. Le surplus de ce prix total doit appartenir à l'époux propriétaire de l'héritage ou à ses héritiers.

Tout ce que nous venous de dire des fermages des biens de campagne, doit aussi s'appliquer aux champarts, soit qu'on les perçoive en nature, ou qu'ils soient donnés à ferme. Ils ne sont dus qu'au temps que se fait la récolte des fruits sur lesquels ils doivent être perçus.

Il en est autrement des loyers de maison : ils entrent dans la Communauté à proportion du temps qu'elle a duré; et ils sont censés échus jour par jour, quoiqu'ils ne soient pas payables chaque jour, et que le terme fixé par le bail pour le payer, ne fût pas encore arrivé lorsque la Communauté s'est dissoute.

Cette différence est fondée sur ce que le fermage d'un bien de campagne étant le prix des fruits que le fermier doit recueillir, il ne le doit qu'après qu'il les a recueillis. En effet, si, par quelque événement de force majeure, tel qu'une grèle, une inondation, les fruits venaient à périr entièrement avant la récolte, il ne serait dû aucun fermage. Au

Ce que nous venons de dire du loyer des maisons, doit aussi s'appliquer aux arrerages des rentes, soit foncières, soit constituées, soit perpétuelles ou viagères ces arrérages échoient aussi chaque jour. C'est pourquoi, lors du rachat d'une rente, on est obligé de payer avec le principal, non-seulement les arrérages échus jusqu'au dernier terme, mais encore ceux que l'on doit pour chaque jour qui s'est écoulé depuis le dernier terme jus qu'au moment du rachat.

Au surplus, comme ce qui est dû de loyer on d'arrerages de rente pour un jour, ne se subdivise pas et n'est véritablement dû que quand ce jour est entièrement écoulé, il faut en conclure que la Communauté n'a rien à prétendre dans le jour de loyer ou d'arrérages auquel elle est dissoute.

Les arrérages de cens sont une autre espèce de fruits civils qui suit des règles particulières. V. l'article Arrérages.

[ VII. Les bénéfices, qui échoient pendant le mariage, d'un bail à ferme, d'une entreprise, d'une exploitation, d'un traité quelconque qui a une date antérieure au mariage, tombent-ils dans la Communauté?

Cette question ne peut faire difficulté que dans un cas, celui où le fonds du droit qui est la source et le principe des bénéfices, est, ou de nature à ne pas entrer lui-même dans la Communauté, ou frappé d'une stipulation de propre par le contrat de mariage.

S'agit-il, par exemple, d'un intérêt mobicharbons, soit de toute autre matière métallier dans une exploitation de mines, soit de intérêt appartenait lors du mariage, ne l'a lique ou terrestre (1)? Si l'époux à qui cet pas stipule propre, il est certain qu'il tom. bera dans la Communauté; et alors il n'y aura plus de question pour les bénéfices, qui bien sûrement suivront le sort du capital.

Mais si cet intérêt a été stipulé propre, ou, ce qui revient au même, s'il appartient à une personne domiciliée dans la coutume de Paris, qui l'a acquis durant un premier mariage dont il lui reste des enfans, et qui contracte une seconde Communauté; alors,

contraire, un loyer de maison est le prix de d'après l'art. 279 de la coutume, le droit en

la jouissance que le locataire a chaque jour dans cette maison; il échoit donc chaque jour une partie du loyer.

[[Aujourd'hui, il n'y a plus, à cet égard, de difference entre les fermages des biens ruraux et les loyers des maisons : ceux-là sont assimilés à ceux-ci par les art. 584 et 586 du Code civil. ]]

(1) [ A l'époque où j'écrivais ceci dans la deuxième édition, ces sortes d'intérêts étaient toujours mobiliers daus la coutume de Liége: parçon de fosses (disait-elle, chap. 1, art. 6) est tenue pour meuble. Mais l'étaient-elles de droit commun? V. mon Recueil de Questions de droit, aux mots Action, Actionnaire, et Mine, §. 1, n. 3. ]]

lui-même ne deviendra pas commun aux deux époux, et la difficulté tombera sur les produits qui en naitront pendant le mariage. Cette difficulté a été soumise plusieurs fois à l'examen des tribunaux.

Nous la voyons d'abord portée au présidial de la Rochelle. Écoutons Valin sur l'art. 46 de la coutume de cette ville.

« Les profits d'un traité étant du chef de la femme, quoique faits en partie durant la Communauté, sont également sujets à reprises, au moins lorsque le mari n'a contribué en rien à ces profits, n'ayant pas été admis dans le traité par les autres intéressés. Ainsi jugé par sentence du Présidial de la Rochelle, du 5 septembre 1738, en faveur de LouiseMarie Convers, poursuivant sa séparation de corps et de biens, contre Jean Aussour son mari.

» Il s'agissait d'un intérêt que feu Convers, père de la femme d'Aussour, avait eu dans les travaux du havre de cette ville. Après la mort de Convers, le quart qu'il avait dans ces travaux, fut conservé par ses associés à sa femme et à ses enfans. Dans la suite, la Convers, sa fille, s'étant mariée avec Aussour, les travaux furent continués sans que les associés voulussent y admettre Aussour. Les profits faits, tant avant le mariage que depuis, furent réglés à une somme de 7,000 livres ou environ pour la part de la Convers, toutes déductions faites; et c'étaient ces profits qu'Aussour revendiquait, comme lui appartenans à titre de fruits ou revenus, supposant qu'ils étaient tous du temps du mariage. Mais sans avoir égard à ces exceptions, la reprise de la somme entière fut adjugée à

la femme ».

La question s'est représentée à Paris en 1743.

Le sieur Martin, intéressé dans différentes sous-fermes, avait donné l'une de ses filles en mariage au sieur Narcisse; la demoiselle Martin apportait en dot une somme de 80,000 livres : il était dit que partie de cette somme entrerait en Communauté ; le reste était stipulé propre, ainsi que tout ce qui échoirait par la suite à la future. Le sieur Martin père mourut, laissant à sa fille une partie des intérêts dont il était propriétaire. Le sieur Narcisse, pendant l'intervalle qui s'écoula entre la mort de son beau-père et celle de la demoiselle Martin, sa femme, jouit, comme chef de la Communauté, de ces intérêts, et en perçut les bénéfices. Après la mort de la demoiselle Martin,il prétendit n'en devoir aucun compte, parcequ'ils étaient, selon lui, bés dans la Communauté. Les héritiers de sa

tom

femme prétendirent, au contraire, qu'il en devait le rapport, attendu que le droit au bail qui y avait donné lieu, étant un propre de Communauté, les bénéfices qui en avaient résulté, l'étaient eux-mêmes.

Un jurisconsulte, alors l'oracle du barreau, M. Malard, fut pris pour arbitre, et prononça contre le sieur Narcisse. En conséquence, par acte du 20 juin 1753, celui-ci consentit qu'il fut fait emploi, au profit des héritiers de sa femme, de tous les bénéfices qui seraient faits dans les sous-fermes.

Un orateur célèbre, M. Gerbier, a renouvelé depuis la question dans une affaire qui l'intéressait personnellement ; et elle a reçu à son désavantage, la même décision que contre le sieur Narcisse.

Il avait épousé la demoiselle Martin, sœur de la dame Narcisse, et veuve en premières noces du sieur Favre d'Aunoy: son contrat de mariage portait que, dans le cas de survie, il aurait seul toute la Communauté, à l'exclusion des héritiers directs et collatéraux de sa femme. Il était d'ailleurs donataire d'une part d'enfant.

La dame Gerbier avait apporté en dot deux intérêts : l'un dans la caisse de Poissy, l'autre dans la ferme des droits rétablis.

Ces deux intérêts avaient produit des béné fices dont les répartitions avaient été faites pendant la Communauté, et touchées par M. Gerbier.

La dame Gerbier est morte, laissant une fille du premier lit et une du second.

Dans la liquidation, ces deux filles ont demandé que le montant de toutes les répartitions échues pendant la Communauté de leur mère avec M. Gerbier, fût employé dans l'état des reprises qu'elles exerçaient du chef de leur mère; elles se fondaient sur ce que les intérêts dont leur mère était propriétaire avant son second mariage, n'étant point entrés dans la Communauté avec M. Gerbier, les bénéfices quoique échus pendant cette Communauté, n'y étaient point entrés non plus.

M. Gerbier s'en est rapporté à la décision de ses plus habiles confrères. Condamné par eux, il s'est exécuté de bonne grace; et c'est conformément à ses offres qu'un arrêt rendu au parlement de Paris, au rapport de M. Le Fevre d'Amécourt, a ordonné qu'il ferait le rapport de tous ces bénéfices.

A ces jugemens, que l'on peut appeler domestiques, s'en joignent deux rendus dans tout l'appareil judiciaire.

Le sieur Dumas, fermier général des postes, était décédé le 8 juillet 1754. Avant sa

mort, il avait fait un testament par lequel il léguait l'usufruit de tous ses biens à la dame veuve Dumas, sa mère; et quant à la propriété, il en disposait en faveur d'autres personnes.

C'est un usage dans les fermes du roi, que les héritiers d'un fermier général jouissent du droit qu'il avait au bail, jusqu'à la fin de l'année dans laquelle leur auteur est décédé. Ainsi, le sieur Dumas étant mort au mois de juillet 1754, sa succession avait recueilli la part qui lui revenait aux bénéfices de la ferme des postes jusqu'au 1er. janvier 1755.

La dame Dumas, défendue par M. Gerbier, prétendait que ce produit devait être regardé comme un fruit qui lui appartenait, et dont elle pouvait disposer librement en qualité d'usufruitière.

Les légataires en propriété soutenaient, au contraire, que ce produit était, pour le fermier, un capital qui, relativement à l'héri tier en usufruit, devait être considéré comme un fonds dont celui-ci ne devait avoir que les intérêts.

M. de Saint-Fargeau, qui était alors avocat du roi au châtelet, porta la parole dans la cause. Il posa pour principe que « le produit » d'une ferme quelconque est un fruit pour » le propriétaire de la chose qu'il produit, » mais qu'il tient lieu de fonds au fermier. Car » ( ajouta-t-il ), comme le fermier avance ses » fonds pour acheter du propriétaire la ré» colte des fruits de la ferme, quels qu'ils » soient, quand cette récolte manque, la chose » du propriétaire n'est point endommagée; » le proprietaire perd seulement une année » de son revenu, si le fermier est insolvable; » le fermier, au contraire, perd les fonds » qu'il avait avancés pour se procurer la ré>> colte qui trompe ses espérances ».

En conséquence, il finit par conclure à ce qu'il fût ordonné qu'il serait fait un fonds de tout ce que l'intérêt du sieur Dumas avait produit pendant le temps écoulé depuis le 8 juillet 1754, jour de son décès, jusqu'au 1er. janvier 1755, que la dame Dumas aurait les intérêts de ce fonds pendant sa vie, et que la propriété en passerait, après elle, au legataire en propriété.

Ces conclusions furent suivies par sentence du châtelet, du 26 juin 1756; la dame Dumas n'en interjeta pas même appel, et l'exécuta.

Le sieur Moracin avait épousé la demoiselle Jourdain de Blicourt. Tous deux, en se mariant, avaient mis en Communauté différens intérêts qu'ils avaient respectivement dans des sous-fermes.

TOME V.

La dame Moracin était morte la première, laissant une fille. Le sieur Moracin avait obtenu la garde-noble de cet enfant.

Question de savoir si, pendant la durée de cette garde, les produits des intérêts appartenans à la fille du chef de sa mère, avaient ou non été gagnés par le gardien.

Les héritiers du sieur Moracin ( car il était mort, laissant des enfans d'un second lit ) soutenaient l'affirmative, et ils se fondaient sur la disposition de l'art. 267 de la coutume de Paris, suivant lequel le gardien fait les fruits siens durant sa garde. Or, disaientils, les bénéfices provenus de la portion d'intérêt qu'avait la mère de la mineure, n'étaient réellement que des fruits : donc le sieur Moracin les a faits siens: donc la mineure n'a rien à répéter.

De la part de la demoiselle Moracin, on soutenait uniquement que ces bénéfices étaient eux-mêmes des capitaux, des fonds dont la propriété était réservée au mineur, et dont les intérêts seuls pouvaient tomber dans la garde.

Arrêt du 23 août 1766, au rapport de M. l'abbé Terray, qui les adjuge comme capitaux à la demoiselle Moracin.

Voilà bien des préjugés: mais sont-ils aussi décisifs qu'ils sont nombreux ? Tout ce que nous pouvons en dire, c'est qu'ils ont été, depuis, invoqués sans succès dans une cause aussi importante par son objet, que célèbre par l'éclat que lui ont donné ses défenseurs.

Le sieur Baudon avait été marié deux fois, la première en 1716, avec une demoiselle de Verneuil, dont il eut cinq enfans: deux garçons, depuis fermiers généraux, et trois filles mariées, l'une à M. Julien maître des requêtes et intendant d'Alençon; l'autre à M. Bronnot, surintendant des finances de Monsieur ; la troisième au sieur de Troquiny.

La demoiselle de Verneuil, première femme du sieur Baudon, décéda en 1753: le sieur Baudon laissa continuer la Communauté avec ses enfans; il était alors intéressé dans les sous-fermes. En 1756, il obtint un bon de fermier général.

En 1759, songeant à se remarier, il fit faire un inventaire pour dissoudre la Communauté, et fit le partage avec ses enfans. Il se remaria ensuite, âgé de soixante-quatreans, avec la demoiselle de Ligneville, âgée de dix-sept ans, laquelle apporta en dot 100,000 livres qui furent données par Stanislas roi de Pologne. Le contrat de mariage portait stipulation de « Com»munauté en tous biens meubles et conquêts

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