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pour son parrain, ne laisserait d'être suspect, s'il s'écartait considérablement des dépositions des autres témoins. V. les articles Témoin judiciaire, Récusation et Affinité. (M. L'abbé D**.) *

* COMPERSONNIER. C'est celui qui tient une même terre avec un ou plusieurs autres, à la charge de payer au seigneur une redevance pour laquelle tous les compersonniers sont obligés solidairement.

[[Les redevances seigneuriales sont supprimées par la loi du 17 juillet 1793; et la solidarité est abolie dans les rentes foncières par la loi du 20 août 1792. ]]

On appelle aussi Compersonniers, ceux qui vivent en commun et en société au même pain et au même feu, comme cela se pratique dans quelques provinces, V. l'article Communauté tacite. (M. GUYOT.)*

COMPÉSIER. C'est comprendre dans le compoix. V. l'article Compoix.

* COMPÉTENCE. C'est le droit de juger une affaire contentieuse, [[ ou d'expédier un acte de juridiction volontaire.

Nous parlerons, 1o. de la compétence en matiere civile; 2o. de la compétence en matière criminelle; 30. d'une question commune à l'une ou à l'autre matière: celle de savoir si, lorsqu'un tribunal est saisi d'une affaire, la loi qui vient ensuite attribuer à un autre tribunal la connaissance des affaires de la même nature, en dépouille le premier. ]]

§. I. De la Compétence en matière civile. En général, le juge du domicile du défendeur est celui qui doit connaître de la contestation, suivant la maxime, actor sequitur forum rei. Mais cette règle souffre plusieurs exceptions qui sont rappelées sous le mot Action.

[[ En voici d'autres qu'il n'est pas moins important de connaître.

1. Le Code de procédure civile, art. 59, porte, indépendamment de ce qui en est retracé sous le mot Action, qu'en matière de société, tant qu'elle existe, on doit se pourvoir devant le juge du lieu où elle est établie ; -et en matière de faillite, devant le juge du domicile du failli. V. Faillite et Société.

20. La caution solidaire et garante est obligée de plaider devant le tribunal domiciliaire du débiteur principal, lorsqu'elle y est assignée conjointement avec lui pour être condamnée solidairement. C'est ainsi qu'on le jugeait dans l'ancienne jurisprudence. V. mon Recueil de Questions de Droit, au mot Connexité. Et à plus forte raison doit-on juger de même depuis que la loi du 26 ventôse an 4, après avoir

dit, art. 1, que la citation en conciliation
serait donnée devant le bureau de paix du
canton où est situé le domicile du défendeur,
a ajouté, art. 2, qu'elle serait donnée, lorsqu'il
y aurait plusieurs défendeurs coobligés soli-
daires, devant le bureau de paix du canton

où serait situé le domicile de celui d'entre eux
que
le demandeur aurait préféré citer. Aussi
est-il dit dans l'art. 59 du Code de procédure
civile, que, « s'il y a plusieurs défendeurs,
» l'ajournement en matière personnelle scra
» donné devant le tribunal du domicile de
>> l'un d'eux, au choix du demandeur ».

30. L'art. 60 du même Code ordonne que « les demandes formées pour frais par les of >>ficiers ministériels, seront portées au tribunal » où les frais ont été faits ».

4o. On peut voir aux mots Clain et Ville d'arrêt, que, dans l'ancien ordre judiciaire, on pouvait, en certaines contrées et villes de la France, et dans les matières personnelles, attirer un défendeur, même français, devant un juge qui n'était pas celui de son domicile', en saisissant les biens ou les effets que celui-ci possédait dans son territoire.

Mais c'était un privilége particulier à ces pays et à ces villes, et l'on ne pouvait pas en user ailleurs, même entre personnes étrangères à la France. C'est ce qui a été jugé par un arrêt du conseil souverain de Colmar, du 16 janvier 1745, rapporté par M. le premier président de Boug, dans son Recueil des Ordonnances d'Alsace, tome 2, page 266.

5o. Suivant l'art. 14 du Code civil, « l'étran»ger, même non résidant en France, peut » être citédevant les tribunaux français, pour » l'exécution des obligations par lui contractées >> en France avec un Français. Il peut aussi » être traduit devant les tribunaux de France, » pour les obligations par lui contractées en » pays étranger envers des Français ». V. Consuls de France en pays étrangers, Consuls étrangers en France, Convention, Étran ger, S. 1, no. 9, et §. 2 et 3; et ci-après, §. 2.

60. Il est des cas où le lieu dans lequel un contrat a été passé, détermine la compétence des tribunaux pour le jugement des contestations qui naissent de ce contrat. V. le plaidoyer du 22 janvier 1806, rapporté à l'article Etranger, S. 2.

7o. On a vu à l'article Action, que les demandes en revendication de biens, doivent être portées devant les juges de la situation. Mais lorsqu'à une action de cette nature est jointe une demande en exhibition des titres sur lesquels est fondée la possession du défendeur, quel est le juge compétent? V. l'article Exhibition.

So. Sur la compétence en matière de reddition de compte, V. les articles Action, S. 3, et Compte.

9o. Les difficultés qu'un juge peut rencontrer dans la décision d'une affaire, peuventelles être une raison de déroger à cette règle, et de renvoyer cette affaire à un autre juge qui aurait plus de facilités pour la décider?

Cette question s'est présentée au parlement de Paris, dans des circonstances fort remarquables. Les voici telles qu'elles ont été, dans le temps, rapportées par la Gazette des Tri

bunaux :

» Le sieur Paris, Français, après avoir étudié en chirurgie dans cette capitale, a obtenu en 1773 un brevet de Chirurgien-major, pour le service de France, dans le port de Canton en Chine. Arrivé, en 1774, au lieu de sa destination, rendez-vous général de tous les négocians du monde qui trafiquent avec les Chinois, il fit aussi le commerce. Il paraît qu'il a mérité l'estime et la confiance des marchands français, et même des négocians chinois. Le 9 janvier 1779, ayant besoin d'argent pour compléter une cargaison considérable, il emprunta du nommé Coccia, marchand Chinois, 10,000 taels, ce qui équivàut à 75,000 livres, monnaie de France. Il lui en fit son billet, avec promesse d'en payer les intérêts à 10 pour 100 jusqu'au mois de décembre suivant, et à raison de 20 pour 100, dans le cas où il ne payerait qu'en 1780. Le sieur Paris ayant donc acheté les marchandises dont il avait besoin pour un voyage projeté dans I'lle de France, partit pour cette île, dans l'intention de revenir à Canton après la vente de sa cargaison, et l'achat de nouvelles marchandises pour son retour. Arrivé heureusement à l'ile de France, et ayant rempli son objet, il se disposait à retourner à Canton, lorsqu'il fut instruit que l'Inde, par où il devait nécessairement passer pour retourner en Chine, était le théâtre de la guerre, et qu'il courait le plus grand risque d'être pris par les Anglais, ainsi que l'avait été le vaisseau le Duguesclin: il prit le parti de vendre son vaisseau et ses marchandises, et de revenir en France y attendre des temps plus heureux pour retourner en Chine. Pendant cet intervalle le sieur Coccia, Chinois, après l'expiration du délai du billet du sieur Paris, le voyant absent, crut pouvoir passer en compte ce billet à un sieur Bourgogne, autre négociant français; le transport de la créance sur le sicur Paris est au bas du billet français, en caractères chinois, dont la traduction, faite par un interprète, équivaut à ceci : Le 3 de la dixième lune de la 46. année de l'empereur

Kienlong, M. Bourgogne m'a remis l'argent mentionné au présent billet; c'est pourquoi j'ai remis à M. Bourgogne ce papier comme propriété. Signé Coccia.

» La date de ce transport en style chinois, répond à la date française du 17 novembre 1781.

» Il y a dans cette date quelque chose de singulier, et qui jette des soupçons sur sa vérité, et fait une véritable difficulté pour le jugement de la cause.

>> Le sieur Coccia était un négociant chinois, chargé du recouvrement des droits que perçoit l'empereur de la Chine sur le commerce de Canton. Les mandarins l'accusèrent d'avoir diverti les deniers de la caisse. L'empereur s'est fait assurer de sa personne, de ses registres et de ses effets; il a confisqué tous ses biens, l'a rélégué dans la Tartarie, et l'a condamné à couper l'herbe destinée à la nourri ture de ses chevaux. La date de cette disgrace, constatée dans les papiers publics ou lettres de négocians français alors à Canton, est du mois de juillet 1780, antérieure de seize mois à celle du prétendu transport.

» Le sieur Bourgogne, cessionnaire de ce transport, l'a renvoyé aux sieurs MontignyDutimeur et le Déan, négocians français, avec prière de s'en faire payer et de lui en faire passer le montant.

>> Lesieur Montigny-Dútimeur étant à Paris et y sachant aussi le sieur Paris qui y était domicilié, lui a écrit pour lui faire part de sa commission, en lui demandant ses intentions pour le paiement; et sur son refus de payer, le sieur Montigny-Dutimeur, conjointement avec le sieur le Déan, tous deux comme porteurs d'ordre,l'ont fait assigner aux consuls. » Sur cette assignation, en date du 26 septembre 1782, les parties ont comparu le 4 octobre. Le sieur Paris, pour défense, a decliné la juridiction, et demandé qu'attendu que son billet avait été par lui souscrit en Chine et au profit d'un Chinois, il fut renvoyé en Chine pour procéder sur cette demande.

» Sentence qui renvoie les parties à se pourvoir devant les juges de Chine.

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» Appel de cette sentence par les sicurs Montigny-Dutimeur et le Déan.

» La cause sur l'appel a été défendue par MM. Rimbert, pour les appelans; et de Bonnieres, pour l'intime. La défense des appelans était fondée sur la maxime, actor sequitur forum rei. Dans le fait, disait-on, le sieur Paris, défendeur, est Français, domicilié à Paris, il est négociant; le billet est souscrit pour marchandises, au profit d'un negociant :

donc c'est devant les consuls de Paris, qui sont, ratione materiæ, ses juges naturels qu'il a dû être traduit. Que le billet soit souscrit au profit d'un Chinois, qui l'a passé à un Français, il n'en est pas moins vrai que, d'après la règle, ce Chinois lui-même ne pourrait l'assigner devant d'autres juges; donc la sentence qui a ordonné le renvoi en Chine, a mal jugé et doit être infirmée.

» Les défenses du sieur Paris étaient plutót des considérations sur l'impossibilité où seraient les juges français de juger le fond de la cause, que de véritables moyens d'incompétence. Il s'agit, disait-il, de juger d'un billet souscrit en Chine, au profit d'un Chinois, qui en a passé l'ordre écrit en caractères chinois, au profit d'un autre : comment donc juger, lorsqu'on ne connaît pas les lois chinoises, et qu'on n'entend pas les caractères chinois de l'ordre mis au bas du billet, dans lequel on stipule un intérêt exorbitant de 20 pour 100, qui dans nos usages serait usuraire? Pour juger ce billet, il faut savoir si cet intérêt est permis, et si l'acte de transport est passé légalement selon les lois du pays.

» D'ailleurs, ajoutait-il, le sieur Coccia, premier créancier, trésorier des deniers de l'empereur de la Chine, ayant malversé, a été condamné par l'empereur; sa personne et ses biens ont été confisqués au profit de l'empire, long-temps avant la date du transport donc le sieur Paris est débiteur de l'empereur de la Chine, qui lui en redeman dera le paiement lorsqu'il retournera dans cette contrée; et sans avoir égard au jugement en vertu duquel il aurait payé, il pour rait lui faire perdre la vie.

» L'intime répondait : Ces moyens peuvent être des moyens du fond, auxquels les juges auront tel égard que de raison; mais ils ne peuvent pas faire que vous, Français, ne soyez justiciable des juges français, et ces juges français compétens pour vous juger.

» L'arrêt du 2 août 1783 a mis les appellations et ce au néant; emendant, a renvoyé les parties au châtelet, pour procéder sur la demande, et a condamné l'intimé aux dépens ».

» M. l'avocat général Seguier avait estimé (par les considerations présentées par l'intimé, et la nécessité, pour juger sciemment la cause, d'être instruit des lois et usages chinois, de connaitre les caractères de l'ordre mis au bas du billet), qu'il fallait renvoyer les parties, non pas devant les juges de Chine, mais devant le consul de France à Canton; et, pour la sûreté des demandeurs, faire ordonner que le sieur Paris serait tenu de don

ner caution solvable de la somme de 75,000 livres. ]]

est

S. II. De la Compétence en matière criminelle.

I. Le principe général qui a lieu à cet égard, que la connaissance des crimes et des délits graves ou légers appartient aux juges des lieux où ils ont été commis.

Ainsi, le juge du domicile du délinquant, ou celui de la capture, serait obligé de renvoyer l'affaire au juge du lieu du délit, s'il le requérait c'est en effet, la disposition de l'art. 1er, de l'ordonnance criminelle de 1670.

[[Sous le Code du 3 brumaire an 4, le juge du domicile n'avait la concurrence avec le juge du lieu du délit, qu'en matière de faux, de banqueroute frauduleuse, de concussion, de péculat, de vol de commis ou d'associés en matière de finance, commerce ou banque. Le juge du domicile ou de la résidence, et celui du lieu où le coupable était arrêté, étaient seulement compétens pour les actes d'instruction qui précédaient celui par lequel le directeur du jury décidait à quel genre de poursuite il y avait lieu. Il n'était pas, au surplus, nécessaire que le prévenu demandát son renvoi ; le juge devait l'ordonner d'office, lorsque, dans les cas ordinaires, il n'était pas celui du lieu du délit, ou que, dans le cas de faux, banqueroute frauduleuse, concussion, péculat, vol de commis ou d'associés en matière de finance, commerce ou banque, il n'était pas celui du domicile. V. le Code cité, art. 70, 76, 77, 78, 79, 80, 99, 142 et 218.

Mais de ce que le juge du domicile avait, en matière de faux, de banqueroute, etc., la concurrence avec le juge du lieu du délit, s'ensuivait-il que le juge du lieu du délit, qui avait prévenu le juge du domicile, pût renvoyer devant celui-ci? V. l'arrêt du 11 ventose an 12, rapporté à l'article Faux, sect. 2, S. 2.

Au surplus, le Code d'instruction criminelle de 1808 rétablit, art. 23 et 63, la concurrence, pour le jugement comme pour l'instruction, entre le juge du lieu du délit, celui du domicile et celui de la capture du prévenu. V. l'article Vol, sect. 2, §. 4, art. 3, no. 6. ]]

Si l'on ignore l'endroit où le crime a été commis, et qu'il y ait, à ce sujet, contestation entre deux juges voisins, il est nécessaire que celui qui requiert le renvoi, prouve que le délit a été commis dans l'étendue de sa juridiction; autrement, celui des deux qui a

prévenu l'autre, doit être maintenu dans la poursuite du crime.

La connaissance d'un délit commis sur une riviére, appartient au juge le plus voisin de l'endroit où il a été commis; et si l'on trouvait un homme noyé sur le rivage, ce serait au juge ordinaire de l'endroit où on aurait trouvé le cadavre, à en prendre connaissance. [[V. l'arrêt du 20 floréal an 13, rapporté à l'article Cadavre.

En cas de changement ordonné par une loi dans les limites du territoire d'un tribunal, à quels juges appartient la connaissance des délits antérieurs? V. l'article Département. ]]

II. Si le crime avait été commis en deux justices différentes : par exemple, si l'on avait tiré un coup de fusil d'une juridiction dans une autre, et que l'on eût tué quelqu'un, les deux juges pourraient en connaître concurremment ; et celui qui aurait commencé le premier les poursuites, aurait la préférence.

On a demandé si, dans le cas d'un rapt, tous les juges, tant celui de l'enlèvement que ceux des lieux où le ravisseur a passé avec la personne ravie, ont droit d'en connaître ? M. Pussort est de cet avis dans le procès-verbal de l'ordonnance criminelle. Mais il semble que les juges du lieu où le ravisseur a passé, ne peuvent en connaître qu'au défaut du juge du lieu du rapt, et même de celui du viol ou de la séduction consommée: tel est le sentiment de Farinacius, dans sa Theoria crimi nalis, et de d'Argentrée, sur la coutume de Bretagne; c'est aussi ce qui a été jugé par un arrêt de la tournelle du parlement de Paris, du 5 mars 1724.

Lorsqu'on a tué quelqu'un dans une juridiction, d'après un complot formé dans une autre, c'est encore un de ces crimes que les jurisconsultes appellent successifs, et dont la connaissance appartient au juge du lieu où le délit a été consommé, ainsi qu'au juge du lieu où le complot a été formé : Farinacius pense que le premier doit avoir la préférence sur l'autre, et que les accusés doivent lui être renvoyés lorsqu'il le requiert ; mais il paraît, surtout dans le cas dont il s'agit ici, que les deux juges ont un droit égal : et qu'il ne doit y avoir de préférence qu'en faveur de celui qui a prévenu l'autre.

[[Aujourd'hui, le seul complot d'assassi nat, s'il n'a pas été suivi d'un commencement d'exécution, ne peut pas donner lieu à des poursuites criminelles. V. la loi du 22 prairial an 4 et l'art. 2 du Code pénal de 1810.

Du reste, le principe que l'on vient de poser, est encore reçu dans les cas où le complot

est réputé crime. Ainsi, lorsqu'une conspiration a eu lieu contre l'État, la connaissance en appartient concurremment au juge du lieu où elle a été formée et au juge du lieu où elle a éclaté ; et c'est à celui des deux qui a prévenu l'autre, que l'instruction doit demeurer. V. Conspiration.

Il en est de même, en cas de faux, entre le juge du lieu où le faux a été commis et celui du lieu où il a été fait usage de la pièce fausse, avec connaissance de sa fausseté. V. l'article Faux, sect. 2, §. 2. ]]

III. Le juge qui connaît d'un crime, peut aussi prendre connaissance des autres délits que l'accusé a commis dans d'autres ressorts; et il n'est pas tenu de les renvoyer, quand même les autres juges le requerraient : il convient, en effet, que l'instruction de crimes ne soit pas divisée, pour que les coupables subissent les peines qu'ils ont méritées.

Ainsi, dans le cas où il y aurait eu déjà plainte en justice pour raison de crimes dé couverts incidemment, si le juge qui est saisi du crime principal, est supérieur de celui qui a instruit pour des crimes incidens, il a droit d'évoquer la connaissance de ceux-ci, et d'ordonner que les charges et informations seront portées devant lui: s'il n'est pas juge supérieur, il doit, suivant l'art. 5 du tit. 1er. de l'ordonnance criminelle, requérir le renvoi devant lui de ces charges et informations; et, en cas de refus, se pourvoir au parlement.

Mais il en serait autrement, si les crimes incidens n'étaient pas de la Compétence du juge saisi du crime principal; car s'il n'était que juge de seigneur, et que le bailliage auquel il ressortit, fût seul Compétent pour juger les délits découverts incidemment, ce siege aurait droit de connaître de tous les crimes de l'accusé sans exception, à l'exclusion du juge seigneurial, quand même celui-ci aurait commencé le premier l'instruction. C'est ce qui résulte de l'art. 17 de la déclaration du 5 février 1731.

[[ Aujourd'hui, il faut distinguer : ou le juge qui connaît d'un crime, en est encore aux actes de l'instruction préliminaire, lorsqu'il découvre d'autres crimes dont le prévenu qui se trouve devant lui, est soupçonné coupable; ou il ne fait cette découverte que dans le cours des débats qui doivent précéder le jugement définitif.

Au premier cas, le juge ne peut étendre son instruction aux crimes commis hors de son territoire, ou par des personnes qui n'y sont ni domiciliées ni résidentes, et n'y ont pas été arrêtées, qu'en vertu d'un arrêt d'attribution

de la cour de cassation, à moins que ces cri mes ne soient connexes à ceux dont il est déjà saisi. V. mon Recueil de Questions de Droit, aux mots Attribution de juridiction ; et le Code d'instruction criminelle, art. 226.

Au deuxième cas, on doit se conformer à l'art. 361 du Code d'instruction criminelle.

Remarquez, au surplus, que les tribunaux auxquels n'est déléguée que la connaissance des crimes emportant peine afflictive ou infamante, ne peuvent pas cumuler, dans une même procédure, un crime de cette classe avec un délit de police correctionnelle.

Un acte d'accusation avait été dressé et admis contre Nicolas Choley, pour deux vols distincts, dont l'un pouvait emporter une peine afflictive, et l'autre ne pouvait donner lieu qu'à un emprisonnement. L'affaire portée devant la cour de justice criminelle du départe ment de la Haute-Saône, ce tribunal avait reconnu l'irrégularité de ce cumul; mais il avait cru pouvoir la réparer, en ordonnant que le chef d'accusation relatif au vol du ressort de la justice correctionnelle, serait distrait du procès; et trouvant ensuite, d'après la déclaration du jury de jugement, l'accusé convaincu de l'autre vol, il l'avait condamné. Mais celui-ci s'étant pourvu en cassation, arrêt du 5 septembre 1806, au rapport de M. Lamarque, qui,

« Vu l'art. 456 du Code des délits et des peines, du 3 brumaire an 4, §. 5;

» Attendu qu'aux termes de l'art. 228 du même Code, dont la disposition est prescrite, à peine de nullité, par l'art. 232, il ne peut être dressé d'acte d'accusation que pour délit emportant peine afflictive ou infamante; et qu'ici, l'un des deux chefs formellement et distinctement exprimés dans l'acte d'accusation dressé contre Nicolas Choley, précisés dans le résumé de cet acte, et ainsi nominativement soumis à la délibération du jury d'accusation, s'appliquait à une tentative de vol qui ne pouvait emporter ni peine afflictive ni peine infamante, et n'était susceptible que de peine correctionnelle; d'où il suit que l'acte d'accusation, au chef qui se référait à cette tentative, contenait une nullité prononcée par la loi; et que la cour de justice criminelle, en se bornant à déclarer que ce chef ne serait point soumis au jury de jugement et laissant subsister l'acte d'accusation dont les deux chefs avaient pu également déterminer la déclaration affirmative des premiers jurés, a contrevenu à l'art. 228 précité de la loi du 3 brumaire an 4;

» Par ces motifs, casse et annulle.... ».

V. encore là-dessus l'article Connexité, §. 2 et suivans. ]]

IV. Il est sensible que le juge Compétent, pour connaître du crime d'un accusé, doit juger ses complices : ainsi, le juge qui connaît d'un vol a droit de prendre connaissance du recélé, quoique commis hors de son ressort.

[[ Mais de là s'ensuit-il que, si le principal accusé est, à raison de sa personne, justiciable d'un tribunal d'exception, ses complices doivent être distraits de la juridiction des tribunaux ordinaires, et être jugés en même temps que lui par ce tribunal. V. l'article Connexité, S. 4.

S'ensuit-il encore de là qu'en vertu d'un ordre du gouvernement qui ordonne que les auteurs, fauteurs et complices d'un crime seront poursuivis devant les tribunaux, les tribunaux puissent instruire, sans autorisation spéciale, contre ceux des complices de ce crime qui, en leur qualité d'agens du gouver nement, sont investis par l'art. 75 de la constitution du 22 frimaire an 8, de la prérogative de ne pouvoir être mis en jugement qu'en vertu d'une décision préalable du conseil d'état?

Cette question s'est présentée, dans l'espèce suivante à la cour de cassation.

Le 2e. jour complémentaire an 13, décret qui ordonne qu'en exécution de la loi du 2 fioréal an 11, les auteurs, fauteurs, compli ces et adhérens des faux commis dans la comptabilité de l'ex- receveur - général du département de......, seront traduits devant la cour de justice criminelle et spéciale du département de la Seine, pour y étre jugés.

L'instruction qui se fait en conséquence de ce décret, fournissant de graves indices decomplicité contre le sieur H...., secrétaire-général de la préfecture du département de......, et contre le sieur A...., adjoint du maire de N...., des mandats d'arrêt sont décernés contre eux, et ils sont traduits avec les autres prévenus devant la cour spéciale. Question de savoir si la cour spéciale peut se déclarer Compétente à leur égard, tant qu'une décision du conseil d'état ne l'aura pas autorisée à les poursuivre et à les juger.

Par arrêt du 25 mars 1806, la cour spéciale décide pour l'affirmative et se déclare compétente à l'égard des sieurs H.... et A...., comme à l'égard des autres prévenus, « Attendu que » l'art. 75 de l'acte constitutionnel de l'an S'est » subordonné, dans son exécution, à l'organi»sation du conseil d'état; que les décrets >> organiques du conseil d'état n'ayant été » contrariés par aucun sénatus-consulte ulté

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