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même pas précisément quel est son domicile d'origine; on sait seulement que son père était de la ci-devant province du Languedoc, et on le présume né à Toulouse ; mais on n'en a pas même la certitude.

» D'ailleurs la question de savoir où il doit être réputé domicilié, est ici fort indifférente. Ce n'est pas le domicile du prévenu, c'est le lieu du délit qui détermine la Compétence des tribunaux (1); et dans notre espèce, le prévenu ne pouvant pas être traduit devant les juges du lieu du délit, il doit au moins l'être devant les juges les plus voisins de ce lieu, puisqu'ils participent le plus à l'avantage qu'ont les juges du lieu du délit de pouvoir recueillir avec le plus de facilité tous les renseignemens propres à constater le délit même, et à en faire connaître l'auteur.

» Ce considéré, il plaise à la cour, vu l'art. 65 de la constitution de l'an 8, qui lui attri bue la connaissance des règlemens de juges, et l'art. 11 de la 5e. section du titre i de la 2. partie du Code pénal du 25 septembre 1791, qui punit de quinze années de fers tout fonctionnaire public convaincu d'avoir détourné les deniers publics dont il était comptable; ordonner que le sieur Troette sera traduit devant l'un des directeurs du jury du département du Haut-Rhin, ou autre des plus voisins de l'Helvétie, pour y être pour suivi suivant les lois, comme prévenu du délit mentionné au decret du 12 prairial der nier.

>> Pour justifier le contenu au présent réquisitoire, l'exposant y joint 10. le procès verbal de la vérification de la caisse du sieur Troette, du 13 floréal dernier ; 2o. le décret du 10 prairial suivant ; 3°. les lettres du grand juge ministre de la justice des 6 messidor dernier et 16 fructidor présent mois; 4o. une ampliation de la lettre du ministre du trésor public, du 9 de ce mois.

» Fait au parquet, le 17 fructidor an 13. Signé Merlin.

» Oui le rapport de M. Durand-Borel, l'un des juges... ;

» Attendu que Troette, ci-devant payeur

(1) On a vu plus haut, no. 1, que le Code d'instruction criminelle donne la prévention au juge du domicile et même à celui du lieu de la capture, sur celui du lieu du délit. Si donc le siear Troette avait eu un domicile en France, ou si seulement le lieu de sa dernière résidence dans le territoire français eút été connu, et que la question se fût présentée depuis la mise en activité du Code dont il s'agit, nul doute que le juge de ce domicile ou de cette résidence n'eût été compétent pour lui faire son procès.

du trésor public en Helvétie, est prévenu d'avoir spolié et détourné les fonds publics à lui confiés au nom du gouvernement français, crime prévu par l'art. 11de la 5e, section, tit. 1 de la 2e. partie du Code pénal du 25 septembre 1791; que cet abus d'un fonctionnaire public français dans l'exercice de ses devoirs, ne peut être poursuivi que pardevant les tribunaux de l'empire les plus voisins du lieu du délit ; que le prévenu étant, à l'époque où l'état de sa caisse a été constaté, restreint aux fonctions civiles du paiement des pensions accordées par le gouvernement français aux anciens militaires de l'Helvétie il ne peut être poursuivi que devant les tribunaux ordinaires;

» La cour renvoie Troette, ci-devant payeur du trésor public en Helvétie, prévenu d'avoir détourné et spolié les fonds publics, pardevant le magistrat de sûreté de l'arrondissement de Colmar ; et en cas d'accusation admise, pardevant la cour de justice criminelle du Haut-Rhin.

» Ainsi jugé et prononcé à l'audience de la cour de cassation; section des requêtes, le 23 fructidor an 13 ». ]]

VHI'. Il n'y aurait pas lieu au renvoi, suivant Julius-Clarus et Covarruvias, si l'accusé n'était poursuivi que civilement devant le juge du domicile, à moins qu'il ne fut aussi poursuivi criminellement devant le juge du lieu du délit.

[[Dans ce cas, suivant l'art. 8 du Code des delits et des peines du 3 brumaire an 4, et l'art. 3 du Code d'instruction criminelle, le juge domiciliaire ne doit pas renvoyer, mais surscoir jusqu'à ce que le juge du lieu du délit ait prononcé sur l'action publique. V. l'article Action publique. ]] •

Si un juge saisi d'une affaire criminelle est absolument incompetent pour en connaître, il ne doit pas balancer à la renvoyer d'office, sans attendre qu'il en soit requis. V. l'article Incompétence.

[[IX. Peut-on poursuivre en France, comme coupable d'escroquerie, un Français qui, par des voies illicites, s'est approprié des biens que possédait en France un souverain étranger? Le peut-on surtout lorsque les actes qui sont le fruit de ses manœuvres, ont été passés dans les états du prince à qui on les a extorqués ? Les héritiers de ce prince peuvent-ils intervenir dans l'instance criminelle intentée à ce sujet devant les tribunaux français, et demander la nullité des actes?

Ces questions ont été agitées devant la cour de cassation, le 18 avril 1806, à l'occa

sion de la demande des sieurs F.... et Ch.... en cassation d'un arrêt de la cour de justice criminelle du département de la Seine, qui, faisant droit sur les requisitions du ministère public, et sur l'intervention de la dame de Lannoy et consorts, parties civiles, avait condamné ces deux particuliers comme coupables d'escroqueries envers le feu prince de Rheina, et annulé les actes par lesquels ils s'étaient fait céder tous les biens que celui-ci possédait en France.

Il y a, disaient les sieurs F.... et Ch...., dans l'arrêt que nous attaquons, un excès de pou voir manifeste. Cet arrêt déclare nuls deux actes passés à Rheina, par le duc Guillaume de Looz-Corswarem, c'est-à-dire, par le souverain de Rheina même, par un prince qui tenait de sa souveraineté le droit d'imprimer à ses propres contrats le caractère de lois, par un prince dont les tribunaux français ne peuvent ni examiner ni encore moins censurer la conduite ni l'administration intérieure, par un prince dont l'administration intérieure ni la conduite ne sont pas même soumises à l'examen et encore moins à la cen sure du gouvernement français. L'arrêt que nous attaquons, ne peut donc être considéré, en cette partie, que comme un attentat au droit des gens.

"

« Pour apprécier ce raisonnement (ai-je dit à l'audience de la section criminelle), plusieurs observations sont nécessaires.

» Et d'abord il est constant que c'est en France qu'a été commencé le délit d'escroquerie sur lequel a prononcé l'arrêt dont il s'agit; et dès-là, nul doute que les tribunaux français n'aient eu le droit d'en prendre connaissance, dans l'intérêt de la vindicte publique.Qu'importe que la première victime de ce délit ait été prince étranger? Les princes étrangers ne sont, dans le territoire français, que des particuliers; et les délits qui, dans le territoire français, se commettent à leur prejudice, sont soumis à la juridiction française, comme les delits qui se commettent en France au préjudice de nos concitoyens.

» Il importerait même peu qu'un prince étranger eut, par un acte passé dans ses états, fait grace des délits qui, en France, ont été commis à son prejudice; il importerait même peu que, par cet acte, il cút reconnu pour legitimes les faits qui caractérisent ces delits. - Encore une fois, ce prince n'est, dans le territoire français, qu'un particulier : il ne peut donc point, par un acte passé dans ses états, arrêter les poursuites exercées en France pour la réparation du trouble qu'ont causé ces delits à l'ordre public de la France même.

Il est donc, à cet égard, soumis à la loi géné rale qui veut que, nonobstant les transactions et les désistemens des parties lésées par un délit quelconque, le ministère public en poursuive et en fasse punir les auteurs.

» Ainsi, première vérité imperturbable : c'est que l'escroquerie commise par les demandeurs envers le feu prince de Rheina, a pu être poursuivie correctionnellement en France.

» Une seconde vérité qui n'est pas plus susceptible de contestation, c'est que les héritiers du feu prince de Rheina auraient pu se pourvoir civilement devant les tribunaux français, en nullité des actes que l'on reproche à la cour de justice criminelle d'avoir illégalement anéantis. Et en effet, ils avaient pour prendre cette voie, deux titres également à l'abri de toute contestation.

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» 10. Les sieurs F.... et Ch.... sont Français; et il a toujours été de principe, il est même décidé formellement par l'art. 15 du Code civil, qu'un Français peut être traduit devant un tribunal de France, pour les contrats qu'il a passés en pays étranger, même avec des personnes étrangères. Les héritiers du feu prince de Rheina pouvaient donc faire assigner les sieurs F.... et Ch.... devant un tribunal civil de France, pour voir dire que les actes passés entre eux et leur père, les 4 et 5 mars 1802, seraient déclarés nuls.

» 2o. Non-seulement les biens qui ont fait la matière des contrats du 4 mars 1802, sont situés en France, mais encore il est certain que, si l'aliénation qui en a été faite au profit du sieur F....,est nulle, on doit les considérer comme non alienes, comme existans dans la succession du feu prince de Rheina, et par conséquent comme susceptibles d'être réclamés par les héritiers du feu prince de Rheina.

» Or, par quelle action les héritiers du feu prince de Rheina peuvent-ils, dans cette hypothèse, les réclamer? Ils peuvent les réclamer, ou par revendication, ou par pétition d'hérédité. -S'ils les réclament par revendication, c'est-à-dire, par action purement réelle, c'est indubitablement devant les tribunaux français qu'ils doivent se pourvoir.

-

» Et il en est de même s'ils les réclament par pétition d'hérédité; car la loi générale qui soumet la pétition d'hérédité à la juridiction du tribunal du lieu de l'ouverture de la succession, cesse et perd toute sa force dans le cas où, comme ici, le lieu de l'ouverture de la succession et le lieu de la situation des biens dépendent de deux souverainetés différentes.

En 1568, le parlement de Paris avait

rendu un arrêt qui réglait, entre les héri tiers d'une personne décédée en France, le partage de tous les biens composant sa succession. Parmi ces biens, il y en avait qui étaient situés en Lorraine, pays alors étranger; et il fut question de savoir si ceux-ci étaient compris dans l'arrêt, et si, à défaut d'exécution de l'arrêt en Lorraine, les parties en faveur desquelles il avait été rendu, pourraient se venger sur les biens de France? Par arrêt du 1er. mars 1570, rapporté dans le Commentaire de Brodeau sur la coutume de Paris, art. 164, le parlement de Paris déclara lui-même qu'il n'avait pas entendu prononcer sur les biens de Lorraine, et ordonna qu'à cet égard, les parties se pourvoiraient là et ainsi qu'elles trouveraient convenir.

» Une succession s'étant ouverte en Savoie, des contestations s'étaient élevées pour le par tage; et aprés dix-huit ans de procédures, il y avait été statué par un arrêt-contradictoire du senat de Chambéry. La partie qui avait gagné sa cause, voulut faire exécuter cet arrêt sur les biens que le défunt avait laissés en France, et qui formaient une portion inté grante de sa succession: elle obtint même à cet effet, un paréatis du lieutenant général du bailliage de Bassigny. Mais sur l'appel qui fut interjeté de ce paréatis au parlement de Paris, il y intervint, le 21 mai 1585, un arrêt, rapporté dans la Bibliothèque du droit français de Bouchel, au mot Compétence, et par lequel il fut dit: mal, nullement et incompétemment ordonné et exécuté, bien appelé par l'appelant, et ordonné que, pour le regard des biens situés en ce royaume, les intimés se pourvoiraient par action.

» Brodeau et Tronçon, sur les art. 164 et 165 de la coutume de Paris, nous retracent deux autres arrêts semblables, des 14 mars 1603 et 7 janvier 1609.

» Il est donc bien démontré que les héritiers du feu prince de Rheina pouvaient, soit par action personnelle en nullité, soit par revendication, soit par pétition d'hérédité, saisir les tribunaux civils français de leur réclamation contre les actes passés au profit du sieur F...., les 4 et 5 mars 1802.

» Mais, cela posé, n'est-il pas évident qu'ils ont aussi pu intervenir comme parties civiles, dans le procès correctionnel qu'ils ont trouvé pendant entre le ministère public et le sicur F.... ? Le droit d'intervenir comme partie civile dans un procés criminel, correctionnel, ou de police, dérive essentiellement de celui d'agir civilement et par action séparée, pour raison du fait qui donne lieu à ce proces; et c'est ce qui résulte de l'art. 8 du Code des de

lits et des peines, du 3 brumaire an 4 : l'ac. tion civile, y est-il dit, peut être poursuivie en méme temps et devant les mêmes juges que l'action publique; elle peut aussi l'étre séparément, etc.

D'après toutes ces données, conçoit-on comment les demandeurs peuvent ici accuser d'excès de pouvoir, d'attentat au droit des gens, la disposition de l'arrêt attaqué qui déclaré nuls les actes des 4 et 5 mars 1802? Si le feu prince de Rheina vivait encore, et qu'il voulût lui-même revenir contre ces actes, lui suffirait-il pour cela de les annuler, soit par un rescrit, soit par un jugement qu'il rendrait en son conseil? Non assurément; il faudrait qu'il vint plaider en France; il faudrait qu'il se constituât partie privée devant les tribunaux français. Et si, pour le prouver, il était besoin d'un exemple célèbre, nous rappellerions celui de Louis XIII, plaidant comme particulier devant les juges de la Belgique, en nullité de la vente que Henri IV, son père, avait faite le 8 février 1602, à Simon Rodrigues de Véga, de la baronnie de Rhodes, située dans le pays d'Alost; nous rappellerions, d'après Dulaury, §. 162, l'arrêt du grand conseil de Malines, du 23 juin 1626, qui débouta Louis XIII de sa réclamation; et nous demanderions si le feu prince de Rheina avait, sur ses biens situés en France, plus d'autorité que n'en avaient Henri IV et Louis XIII sur leurs biens situés dans la Flandre espagnole?

>> Remarquez, d'ailleurs, que Louis XIII fondait sa demande en nullité, sur la disposition de la coutume d'Alost par laquelle était prohibée toute alienation de fiefs tenant nature de propres, qui n'était pas commandée impérieusement par les besoins et la détresse du vendeur, et que, pour apprécier cette demande, il fallait entrer dans l'examen de la fortune du roi Henri IV, à l'époque de la vente. Et jugez, d'après cela, s'il sied bien aux rédacteurs d'une consultation qui vous a été distribuce, de venir vous dire que les tribunaux français étaient incompetens pour prononcer sur des actes qui disposaient dans l'intérêt de l'administra tion et du gouvernement intérieur d'un chef de maison princière, souveraine et étrangère?

» Ce n'est pas avec plus de raison que l'on cherche, dans cette consultation, à faire considérer ces actes comme des contrats purement politiques, et placés, comme tels, hors de la Compétence des tribunaux de tous les pays. Il est vrai que, par des conventions diplomatiques, le feu prince de Rheina était oblige, en recevant ses nouveaux états à titre d'indemnité de ceux qu'il avait perdus par

nos conquêtes, de vendre, dans deux ans, tous les biens qu'il possédait sur la rive gauche du Rhin. Mais en quelle qualité devait-il les vendre, d'après ces conventions? Il devait, sans contredit, les vendre en la qualité qu'il les possédait. En quelle qualité les possédait-il? Comme souverain? Non, il les possédait comme particulier : c'était donc comme particulier qu'il devait les vendre; il ne pouvait donc les vendre que comme particulier. Si donc, en les vendant, il a éprouvé une lésion qui, soit par šon énormité, soit par le dol et la fraude qui en ont été le principe, peut amener la resolution de la vente, il a nécessairement conservé le droit d'attaquer la vente comme tout autre particulier qui, les possédant en propriétaire libre, les aurait vendus et mis hors de sa main. Il a donc transmis ce droit à ses héritiers. Ses héritiers ont donc pu exercer ce droit devant les tribunaux, comme il pourrait l'exercer lui-même, s'il vivait encore. » A des idées aussi simples, aussi décisives, on ne craint point d'opposer une réclamation portée, dit-on, aux pieds du trône, et appuyée par l'une des plus grandes puissances de l'Europe. Nous ignorons si cette récla mation existe, et si, en effet, elle a paru avec l'appui qu'on lui suppose. Mais nous connais sons assez les dispositions du gouvernement sur toute cette affaire, pour que, sans vouloir pénétrer dans des secrets qu'un voile religieux doit nous dérober, nous nous croyions autorisés à vous dire, ou que cette réclamation n'existe pas, ou que, si elle existe, le gouvernement n'y a aucun égard.

» Par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de rejeter les requêtes des demandeurs et de les condamner à l'amende ».

Arrêt du 18 avril 1806, au rapport de M. Barris, par lequel,

« Attendu que, d'après l'art. 8 du Code du 3 brumaire an 4, l'action civile qui apparte nait aux dames de Lannoy et consorts, a pu être suivie cumulativement avec l'action publique et devant les tribunaux qui étaient saisis de celle-ci; que leur intervention a donc été légalement accueillie; que l'escroquerie qui était l'objet des deux actions, ayant été effectuée en France, par des Français, et sur des biens situés sur le territoire français, la réparation du dommage produit par cette escroquerie, a dû être prononcée par les tribunaux français; que les actes des 4 et 5 mars 1802, qui ont été jugés le complément de cette escroquerie, portant sur des biens situés en France, ont donc pu et dû être annulés dans leur rapport avec l'application des lois françaises et dans leur force d'exécution sur le

territoire français; que c'est là le seul effet qui puisse résulter de l'arrêt attaqué, et le sens unique de son dispositif, qui, d'après tous les principes du droit public, ne peut évidem ment avoir d'exécution que sur le territoire regi par les lois françaises et dépendant de l'empire français ;

» La cour rejette le pourvoi....... ». ]]

X. Telles sont les règles générales que l'on suit en matière de Compétence : les exceptions dont elles sont susceptibles, ont lieu, soit relativement à la nature des délits, soit à cause de la qualité des délinquans.

D'abord, les ecclésiastiques promus aux ordres sacrés, ou pourvus de bénéfices, ne sont justiciables que des officialités pour raison de délits communs : ils peuvent y demander leur renvoi, même après avoir reconnu la juridiction laïque. L'official peut également le requé rir en tout état de cause; mais s'il y avait un crime privilégié avec le délit commun, le renvoi ne pourrait être fait devant le juge d'église, qu'à la charge du cas privilégié, dont le juge royal se réserverait la connais

sance.

Les gentilshommes ne peuvent pas être poursuivis criminellement devant les châte lains et prévôts royaux : ils doivent l'être devant les baillis ou sénéchaux; mais l'ordonnance criminelle déclare qu'elle n'entend point préjudicier à la juridiction des juges des seigneurs ; aussi peuvent-ils connaître des délits commis par des gentilshommes, suivant une déclaration du 24 février 1536, rendue en interprétation de l'édit de Cremieu.

Les gentilshommes et les ecclésiastiques ont aussi la prérogative de pouvoir demander, en tout état de cause, d'être jugés en la grand'chambre du parlement assemblée, pourvu toutefois que ce soit avant l'ouverture des opinions; mais lorsqu'ils ont requis d'être jugés en la grand'chambre, ils ne peuvent plus demander d'être renvoyés à la tournelle.

Quelques officiers ont encore le privilége special de ne pouvoir être poursuivis pour crimes, qu'en la grand'chambre du parlement de Paris tels sont les présidens, maîtres ordinaires, correcteurs, auditeurs, avocats et procureurs généraux de la chambre des comptes de Paris.

Si cependant ces officiers avaient commis quelques délits hors de la ville, prévôté et vicomte de Paris, les baillis et sénéchaux pourraient informer contre eux, et même les décréter si les crimes étaient capitaux, à la charge de renvoyer les procédures à la grand'chambre, pour être instruites et jugées; mais

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si ces officiers avaient procédé volontairement devant les baillis et sénéchaux, ils ne pour raient plus se pourvoir à la grand'chambre que par appel.

Les officiers des parlemens prétendent aussi ne pouvoir être poursuivis qu'en la cour dont ils sont membres, et jugés toutes les chambres assemblées : ce qu'il y a de certain, c'est que le parlement de Paris s'est maintenu dans cette prérogative.

Quant aux officiers du grand conseil, le droit qu'ils ont de n'être jugés que par leur compagnie, n'est susceptible d'aucune diffi culté, puisqu'ils y ont été maintenus par un arrêt du conseil, du mois de février 1681.

Il y a d'autres officiers qui jouissent des mêmes prérogatives que les gentilshommes, savoir, les secrétaires du roi et les principaux magistrats des siéges royaux et présidiaux.

Les officiers des eaux et forêts, ainsi que ceux des maréchaussées, ont leurs causes com. mises au plus prochain tribunal, tant en matière civile que criminelle.

Les sergens à verge et les huissiers à cheval au châtelet de Paris ont aussi leurs causes commises devant le lieutenant criminel de ce siége, suivant les édits de septembre 1672 et octobre 1712; et leur privilége a lieu lors même que le ministère public est partie, à la différence des officiers des eaux et forêts, et autres privilégiés qui rentrent, en ce cas, dans la classe commune.

Les commis et autres employés aux fermes ne peuvent être décrétés que par les juges royaux, pour les crimes qu'ils ont commis hors l'exercice de leurs fonctions.

Les seigneurs qui ont droit de justice, ne peuvent être poursuivis en matière criminelle, ni poursuivre qui que ce soit à leur requête, devant leurs juges ; ils doivent alors se pourvoir devant le juge supérieur.

Enfin, il paraît que les écoliers des universités doivent jouir du privilége de scolarité en matière criminelle, lorsque le crime dont ils sont prévenus, a été commis dans le lieu de la juridiction du conservateur, et que ce juge a la juridiction criminelle par exemple, si un crime avait été commis à Orléans, par un étudiant en droit, dans l'étendue de la justice de Sainte-Croix, ce serait au bailliage criminel à en connaître, comme juge conservateur, et non au bailli de Sainte-Croix. [[ Tous ces priviléges ont été abolis par l'art. 13 de la loi du 7-12 septembre 1790.

Mais il a été fait depuis d'autres exceptions aux règles générales de la Compétence en matiere criminelle.

1o. Avant le Code d'instruction criminelle,

les juges, quels qu'ils fussent, ne pouvaient, pour délits commis dans l'exercice de leurs fonctions, être mis en accusation que par la cour de cassation. V. la loi du 27 ventose an 8, art. 8o et suivans.— Aujourd'hui, il y a là-dessus plusieurs distinctions à faire. V. les art. 479, 480, 481, 482, 483, 484, 485 et 486 du Code cité.

2o. Sous le gouvernement qui a fait place à la restauration de 1814, les membres de la famille régnante, les grands dignitaires, les ministres, les grands-officiers de la couronne, les sénateurs, les conseillers d'état, n'étaient justiciables, en matière de délits quelconques, que de la haute-cour impériale. — Il en etait de même, dans certains cas, des capitaines généraux des colonies, des préfets coloniaux, des préfets de département, des généraux de terre et de mer, des cours d'ap, pel, des cours d'assises, des cours spéciales, et des membres de la cour de cassation. V. l'article Haute-Cour impériale.

30. Les juges de France peuvent-ils instruire contre les gens de mer étrangers qui commet, tent des délits à bord de leurs bâtimens, dans un port, dans une rade, dans une baie française ?

Voici ce que porte là-dessus un avis du conseil d'état, du 28 octobre 1806, approuvé, le 20 novembre suivant.

« Le conseil d'état qui.... a entendu le rapport de la section de législation sur celui du ministre de la justice, tendant à régler les limites de la juridiction que les consuls des États-Unis d'Amérique, aux ports de Marseille et d'Anvers, réclament par rapport aux délits commis à bord des vaisseaux de leur nation, étant dans les ports et rades de France;

» Considérant qu'un vaisseau neutre ne peut être indéfiniment considéré comme lieu neutre; et que la protection qui lui est ac cordée dans les ports français, ne saurait dessaisir la juridiction territoriale, pour tout ce qui touche aux intérêts de l'état;

» Qu'ainsi, le vaisseau neutre admis dans un port de l'état, est de plein droit soumis aux lois de police qui régissent le lieu où il est reçu ;

» Que les gens de son équipage sont également justiciables des tribunaux du pays, pour les délits qu'ils y commettent, même à bord, envers des personnes étrangères à l'équipage, ainsi que pour les conventions civiles qu'ils pourraient faire avec elles ;

» Mais que si, jusque-là, la juridiction territoriale est hors de doute, il n'en est pas ainsi à l'égard des delits qui se commettent à

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