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été condamné à mort, laissa à Versailles, des ef fets tant mobiliers qu'immobiliers,et des actions mobilières : le fermier de Versailles demanda, non-seulement les immeubles de cette ville et les meubles meublans qui s'y trouvaient, mais encore les loyerséchus avant la condamnation : le fermier de Paris, pretendit, au contraire, que

Tanton etant domicilié à Paris, et ayant été con. damné à mort et exécuté, les actions mobiliè res qu'il avait à exercer à Versailles, étaient adhérentes à sa personne. Sur cette contesta. tion, le conseil décida que les meubles corporels trouvés à Versailles,devaient appartenir au fermier de Versailles, et que les actions mobilières et immobilières devaient être exercées par le fermier de Paris. [[V. l'article Loi, §. 6, no. 3.]]

XII. Les trésoriers de France, des bureaux des finances, et les autres juges qui connaissent des domaines dans les provinces où il n'y a point de bureaux des finances, sont seuls competens pour prendre connaissance des discussions et du recouvrement des confiscations adjugées au roi.

Ce recouvrement doit être fait par l'admi; nistration des domaines. C'est ce qui résulte des lettres-patentes du 12 juillet 1687, lesquelles portent que les arrêts et jugemens en dernier ressort seront remis aux receveurs des domaines, pour poursuivre le recouvre, ment des confiscations et en rendre compte.

C'est d'après cette jurisprudence, que, par arrêt du 30 juillet 1743, le conseil a cassé et annulé divers arrêts de la cour des monnaies de Paris, qui avaient ordonné l'enregistrement d'une saisie réelle que les gardes de l'orfévrerie avaient fait faire d'une maison située

à Paris, et adjugée au roi à titre de confisca tion, contre le nommé Vilain, orfévre, que cette cour avait condamné à mort en consé

quence,le conseil a ordonné que la saisie réelle demeurerait convertie en opposition entre les mains du receveur général des domaines, et que la maison serait vendue, après trois pu blications, à la requête du procureur du roi au bureau des finances, sur les poursuites du même receveur.

XIIbis. Les effets saisis sur des voleurs, ne sont confisqués qu'autant que l'on ne connaît pas les personnes auxquelles la restitution en doit être faite. Tous les juges qui prononcent la confiscation, peuvent ordonner cette restitution comme une suite de la même instruction et du même jugement; mais les effets qui restent après la restitution, doivent être remis aux administrateurs des domaines, pour être vendus à leur diligence, à la requête du procureur du roi au bureau des finances, et les

deniers en provenans distribués ensuite,par les mêmes administrateurs, aux personnes qui y ont droit. C'est ce qui résulte des arrêts du conseil, des 9 septembre 1710 et 13 juillet 1723.

[[ XIII. La confiscation pour crime a été abolie dans toute la France par la loi du 21 janvier 1790; mais elle a été rétablie par les lois des 30 août 1792, 19 mars 1793 et 1er. brumaire an 2, pour les crimes attentatoires à la sûreté générale de l'état, et pour celui de fausse monnaie.

Ces lois ont été maintenues, quant au crime de fausse monnaie, par celle du 14 floréal an 3, dont un arrêté du gouvernement du 6 thermidor an 11 a ordonné la publication dans la Belgique et les quatre nouveaux départemens de la rive gauche du Rhin.

Elles l'ont aussi été, quant aux crimes attentatoires à la sûreté générale de l'état, par la loi du 21 prairial de la même année.

Elles l'ont également été par le Code pénal de 1810, quant à ces deux genres de crime, à la contrefaction des sceaux de l'état, et à la contrefaction ou falsification, soit des effets émis par le trésor public avec son timbre, soit des billets de banque autorisés par la loi. V. les art. 75, 76, 77, 80, 81, 82, 86, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 132, 139, et 140 de ce Code,

Mais toutes ces lois sont abrogées sans exception par l'art. 66 de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814 : « La peine de la confis» cation des biens (y est-il dit) est abolie, et ne pourra pas être rétablie ».

XIV. Lorsque la confiscation avait lieu, celle des biens du mari embrassait-elle la créance qu'il avait sur un immeuble hypothéqué au douaire de sa femme, et qui, dans sa main, représentait cet immeuble précédemment vendu par lui, à la charge que l'acquéreur serait personnellement soumis à payer le douaire, en cas que ce droit vînt à s'ouvrir? En conséquence, la veuve n'avaitelle action pour son douaire, que contre l'état,

confiscataire de la succession de son mari? Ou bien cette créance se détachait-elle, de plein droit, à la mort du mari, de la masse de sa succession confisquée, et la veuve pouvaitelle la réclamer comme sa propre chose?

Cette question s'est présentée dans l'espèce suivante.

Le 2 février 1769, Jean-Simon Aved-Loizerolles épouse la demoiselle Marteau, et lui constitué un douaire de 1,500 livres, dont le capital, sur le pied du denier 25, sera propre aux enfans à naître du mariage.

Le 12 août 1782, Jean-Simon Aved vend à Françoise Dalize une maison située à Paris,

• quai de Conti (son seul immeuble), moyennant la somme de 70,000 livres : 20,000 livres sont payés comptant par l'acquéreur ; et à l'égard des 50,000 livres restant, celui-ci les retient et s'en charge pour fournir le douaire dont il vient d'être parlé; au moyen de quoi, il promet et s'oblige de fournirledit douaire, en cas qu'il ait lieu, et selon ce qui a été stipulé; et dans le cas où il n'aurait pas lieu, il s'oblige de rembourser les 50,000 livres audit Aved de Loizerolles, avec les intérêts jusqu'au remboursement.

En 1787, cette maison est saisie réellement sur Dalize, à la requête du sieur Caron-Beaumarchais, pour une créance de 18,000 livres.

Le 9 juillet 1793, jugement qui autorise la

dame de Monthion, subrogée aux poursuites

du saisissant, à faire vendre la maison.

Jean-Simon Aved forme aux criées une opposition à fin de conserver.

Le 24 juillet suivant, la maison est adjugée à Jérémie Collineau pour 99,800 livres.

Le 3 août, pour se conformer à l'art. 12 de l'édit de février 1689, qui obligeait les adjudicataires, par décret forcé, à consigner dans la huitaine le prix de leur adjudication, Jérémie Collineau dépose les 99,800 livres dans la caisse du receveur des consignations.

Le 9 du même mois, il forme sur cette somme une opposition pour sûreté de l'emploi des fonds aux douaires auxquels la maison pourrait être affectée.

Le 20, le décret est enregistré et délivré Jérémie Collineau.

Le 4 octobre de la même année, le receveur des consignations, pour obéir à la loi du 23 septembre précédent, verse les 99,800 livres à la trésorerie nationale.

publique à concurrence du montant de son douaire.

la

Le lendemain, 3 nivôse an 3,.il intervient, sur la poursuite de la femme Dalize, un jugement d'ordre qui colloque 10. les frais de poursuite; 2o. la régie des domaines pour somme de 50,000 livres en capital, et celle de 11,946 livres d'intérêts, dues à la succession de Jean-Simon Aved, sauf à la veuve Aved à faire régler ses droits envers la république, pour raison de son douaire; 3o. la même régie pour la créance de Caron-Beaumarchais, alors inscrit sur la liste des émigrés; 4o. la femme Dalize. — Et attendu que le prix consigné se trouve absorbé par ces collocations, le jugement fait main-levée des autres oppositions, notamment de celle de Jérémie Col

lineau.

Il ordonne en outre que les créanciers colloqués recevront de la trésorerie nationale le montant de leurs collocations.

Le même jour, l'administrateur des domaines nationaux, informé des démarches faites auprès de la convention nationale pour obtenir l'annullation du jugement révolutionnaire du 8 thermidor an 2, signe un ordre qui autorise la régie à suspendre, dans la maison du condamné Jean-Simon Aved, toutes les opérations relatives à la confiscation des biens.

Le 14 pluviose suivant, décret de la convention nationale qui,

« Considérant 10. que l'acte d'accusation du 6 thermidor est porté contre François-Simon Aved-Loizerolles fils, âgé de 22 ans; que, dans la déclaration des jurés, se trouvent les mêmes dénominations; qu'on y a substitué Jean au lieu de François, père, au lieu de fils, et surchargé les deux chiffres 22, pour y mettre les chiffres 61; et qu'on y a ajouté ces Le 8 thermidor an 2, Jean-Simon Aved mots: ancien lieutenant-général au bailliage perit sur l'échafaud, en vertu d'un jugement de l'arsenal; 20. que, dans la transcription du tribunal révolutionnaire, rendu par suite de l'acte d'accusation en tête du jugement du d'un acte d'accusation dressé le 6 du même 8 thermidor, on y trouve seulement le mot mois contre François Simon, son fils. Ce Jean substitué à François; qu on y a laissé jugement emportait la confiscation de tous les mots fils, ágé de 22 ans ; qu'ensuite, dans ses biens. le vu des pièces et dans la prononciation du jugement, se trouvent les mots Jean-Simon Loizerolles; 2°. que l'acte d'accusation a été porté contre Loizerolles fils, alors détenu dans la maison d'arrêt dite Lazare, et depuis mis en liberté; qu'il n'y a eu aucun acte d'accusation porté contre Loizerolles père ; qu'il ne pouvait par conséquent être mis en jugement; qu'il n'a été compris sur la liste des condamnés que par,une substitution de nom infiniment coupable, et qui fait disparaître à son égard toutes apparences de formes légales;

La femme Dalize, créancière de son mari, et, en cette qualité, opposante au décret du 3 août 1793, poursuit l'ordre du prix.

Le cinquième jour complémentaire an 2, un projet d'ordre est dressé entre elle et les administrateurs des domaines nationaux. · Le 22 frimaire an 3, elle forme sa demande en distribution des 99,800 livres.

Le 2 nivose suivant, la veuve Aved présente au bureau de la liquidation du passif des émigrés et des condamnés, une pétition tendante à ce qu'elle soit reconnue créancière de la ré

>> Déclare le jugement du tribunal révolu tionnaire, du 8 thermidor, non avenu à l'égard de Jean-Simon Loizerolles, et n'y avoir lieu à la confiscation des biens dépendans de sa succession; ordonne que les scellés et les séquestres qui pourraient avoir été mis, soient levés sur-le-champ partout où besoin

sera n.

Le 7 thermidor an 7, la veuve Aved et François-Simon, son fils, forment, contre Jérémie Collineau, une demande en declaration d'hypothèque, pour raison du douaire stipulé par le contrat de mariage du 2 février 1789; et ils joignent à cette demande une tierce-opposition au jugement d'ordre du 3 nivose an 3.

En l'an 10, un second fils de la dame Aved, officier d'infanterie au service du roi de Prusse, intervient et adhère aux conclusions prises par sa mère et son frère aîné.

Jérémie Collineau les soutient tous nonrecevables, 1o. parceque la veuve a fait acte de commune, et que les enfans ont fait acte d'héritier; 20. parcequ'ils ne rapportent pas un inventaire régulier de la communauté et de la succession. Subsidiairement il conclud à ce qu'ils soient déboutés de leur demande. Le 11 messidor an 10, jugement du tribunal de première instance du département de la Seine, qui rejette les fins de non-recevoir de Collineau; et, au fond, prononce en sa faveur.

Appel de la part de la veuve et des enfans Aved; et le 2 fructidor an 11, arrêt par lequel, « Considérant que la république, en qualité de confiscataire, avait succédé à la créance privilégiée d'Aved-Loizerolles sur le prix déposé aux consignations; qu'il résulte évidemment des lois alors en vigueur, que cette créance était devenue pour le tout actuellement exigible en faveur de la république, nonobstant toutes réclamations et opposi tions; qu'en effet, le douaire de la veuve AvedLoizerolles était, par sa nature, une dette de la succession de son mari; qu'elle n'en était saisie qu'en ce sens, que les arrérages couraient à son profit sans demande judiciaire; que, par conséquent, elle et ses enfans n'avaient aucun droit dans les deniers déposés; qu'en outre, ils étaient devenus créanciers directs de la république pour les arrérages du susdit douaire; qu'ils n'en pouvaient obtenir le paiement qu'après une liquidation administrative, et qu'en attendant cette liquidation, la solvabilité de la garantie nationale leur offrait une sûreté dont tous les créanciers de la république étaient obligés de se contenter; que, de tous ces points éga

lement incontestables, il y a nécessité de conclure qu'en intervenant dans l'ordre, les appelans n'auraient pas pu empêcher la répu blique d'être colloquée pour le montant inté gral de la créance de leur père et mari, ce qui suffit pour écarter la tierce-opposition tout à la fois non-recevable et mal fondée; que Collineau, à qui il n'était pas permis plus qu'aux appelans de mettre en question la solvabilité nationale, n'avait non plus aucun prétexte pour s'opposer à cette collocation; que, s'il l'eût fait, sa réclamation aurait été écartée par le principe que l'action hypothé caire, vis-à-vis le tiers-détenteur d'un immeuble affecté à un douaire, n'est que subsidiaire, et parceque la république, toujours réputée solvable, étant devenue débitrice directe du douaire des appelans, on ne pouvait pas alléguer la possibilité du recours subsidiaire; qu'ainsi, la collocation dont il s'agit, a été valablement ordonnée par le jugement d'ordre du 3 nivóse an 3; que l'effet nécessaire de cette collocation, et de la main-levée qui en était la conséquence, a été de libérer Collineau de l'hypothèque de douaire lors ouvert, et ce, pour deux raisons la première, que cette collocation a opéré légale. ment entre les mains de la république le versement de la somme que les lois, sous l'empire desquelles Collineau avait acquis, l'autorisaient à retirer des consignations pour sûreté de ce douaire; la seconde, qu'il ne doit pas souffrir de ce que les appelans sont devenus créanciers directs de la république;

» Attendu, enfin, qu'en déclarant non avenues les confiscations prononcées par les tribunaux révolutionnaires, la loi du 21 prairial an 3 maintient les droits acquis à des tiers pendant l'existence de ces Confiscations;

» Le tribunal (d'appel de Paris) met l'ap pellation au néant et condamne les appelans à l'amende et aux dépens ».

La veuve et les enfans Aved se pourvoient en cassation. -10. Violation de la loi des contrats, en ce que Dalize s'étant, par l'acte du 12 août 1782, oblige personnellement à payer le douaire dont il s'agit, en cas qu'il vînt à s'ouvrir, cette obligation avait formé, dès-lors, pour le douaire, un droit propre et personnel que la Confiscation des biens de Jean-Simon Aved n'avait pas pu atteindre ; 2o. violation de l'art. 256 de la coutume de Paris, aux termes duquel la veuve et les enfans sont de plein droit saisis de leur douaire ; — 3o. violation de l'art. 2 du tit. 35 de l'ordonnance de 1667, qui ouvre la voie d'opposition à toute partie à laquelle nuit un jugement rendu sans qu'elle ait été appelée; -4°. fausse appli

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«La manière dont vous est présenté le premier de ces moyens (ai-je dit à l'audience de la section des requêtes, le 19 thermidor an 12), annonçe assez que les demandeurs le regardent comme le principal pivot de leur réclamation; et en effet, si ce moyen leur échappait, quelle ressource leur resterait-il pour critiquer l'arrêt de la cour d'appel de Paris? Du moment qu'il serait bien reconnu que la Confiscation prononcée le 8 thermidor an 2, contre Jean-Simon Aved, avait exercé son empire sur la totalité de la créance hypothe caire qui lui appartenait, au moment de sa mort, sur la maison vendue à Dalize en 1782, il faudrait nécessairement reconnaître aussi que la totalité de cette créance a dû être touchée par la république; et de là suivrait iné. vitablement la conséquence que la républi que, en touchant cette créance en totalité, avait éteint de plein droit l'hypothèque dont était grevée la maison adjugée le 24 juillet 1793, à Jérémie Collineau.

» Et vainement dirait-on, dans cette hypo. these, que le décret force ne purgeait pas l'hypothèque du douaire non ouvert. Non, sans doute, il ne la purgeait pas : aussi n'estce pas en vertu de son adjudication par de cret du 24 juillet 1793, que Jérémie Collineau s'est prétendu décharge de l'hypothèque réclamée par les demandcurs; il a seulement soutenu et fait juger que cette hypothèque était éteinte par le versement fait à la tresorerie nationale, de la somme à laquelle s'élevait le capital du douaire ouvert par la mort de Jean-Simon Aved. Or, dans notre hy. pothèse, il n'a soutenu en cela, et la cour d'appel de Paris n'a jugé qu'une chose parfaitement conforme à la lettre autant qu'à l'esprit des lois de la matière.

» C'est un principe incontestable que, pour éteindre l'hypothèque dont est grevé son fonds, le possesseur n'a besoin que d'acquitter la créance hypothéquée : Eum non ampliùs dando quàm quod reverá debet, hypothecam liberare, ce sont les termes de la loi 16, S. 6, D. de pignoribus et hypothecis, Si donc, immédiatement après la mort de JeanSimon Aved, Jérémie Collineau avait payé à sa veuve et à ses enfans le montant de leur douaire, ou ce qui revient au même, si, à cette époque, la veuve et les enfans Aved eussent retiré le montant de leur douaire de la caisse des consignations où Jérémie Collineau l'avait versé, nul doute que l'hypothe

que qu'ils avaient sur la maison adjugée l'année précédenteà Jérémie Collineau, ne se fut éteinte de plein droit.

» Mais, par la même raison, il est évident que leur hypothèque s'est également éteinte, si, au lieu de toucher eux-mêmes le montant de leur douaire, ils l'ont touché par la main d'un tiers légalement autorisé à le recevoir pour eux. Or, voilà précisément ce qu'ils ont fait, et la preuve de cette assertion n'est pas difficile.

Par le jugement du 8 thermidor an 2, tous les biens de Jean-Simon Aved ont été confisqués au profit de la république ; et dèslors, ils ont dú, aux termes de l'art. 1 de la loi du 26 frimaire an 2, être régis, administrés, LIQUIDÉS et vendus comme les biens nationaux provenans des émigrés.

» C'est donc par les lois relatives aux biens, aux créances et aux dettes des émigrés, qu'ont dû être régis et liquidés les biens, les créances et les dettes qui se trouvaient dans la succession de Jean-Simon Aved.

» Or, quelles sont, sur les biens, les créances et les dettes des émigrés, les lois qui étaient en vigueur à l'époque du jugement d'ordre du 3 nivòse an 3, en vertu duquel la régie des domaines a retiré du bureau des consignations la somme de 61,946 livres qui, par ce jugement, a été déclarée appartenir à la succession de Jean-Simon Aved, confisquée par celui du 8 thermidor an 2? Ces lois sont celles du 8 avril 1792, du 2 septembre de la même année et du 25 juillet 1793.

» La loi du 8 avril 1792 a pour objet de ré. gler le mode d'exécution de celle du 9 février précédent, qui met sous la main de la nation tous les biens appartenans à des émigrés.

» Elle veut, art. 3, que ces biens soient administrés par les régisseurs de l'enregistrement; et elle déclare, art. 4, que l'admi nistration des meubles, effets mobiliers et ACTIONS, se bornera aux dispositions nécessaires pour leur conservation. Ainsi, les actions et par conséquent les créances des émigrés sont enveloppées dans le séquestre national; et la nation se charge de faire, par les mains de la régie de l'enregistrement, toutes les dispositions nécessaires pour leur

conservation.

» Cependant parmi les créances des émigrés, il en est un grand nombre qui sont exigibles; et parmi celles qui ne le sont pas, il en est dont les débiteurs peuvent avoir envie de se liberer. Comment pourvoir à la conservation des uns et des autres?

» L'art. 14 va nous l'apprendre : Les débi teurs des émigrés, à quelque titre que ce

soit, ne pourront se libérer valablement qu'en payant à la caisse du séquestre.

» C'est donc par forme de séquestre, que la nation va recevoir les sommes dues aux émigrés.

» La nation ne les recevra donc pas précisément pour son compte personnel: elle les recevra ponr le compte de ceux qui pourront y avoir droit ; elle les recevra par conséquent pour les remettre aux créanciers que les émigrés peuvent avoir laisses en France, sauf à en retenir le restant à son profit, s'il y a lieu.

» Mais dans tous les cas, les créanciers des émigrés n'ont rien à demander aux débiteurs de ceux-ci personnellement. Les débiteurs des émigrés ne peuvent payer qu'à la caisse de séquestre, et c'est dans la caisse de séquestre que les créanciers doivent reprendre ce que les débiteurs y auront verse.

»Du reste, nulle distinction à cet égard en tre les débiteurs de créances hypothécaires et les débiteurs de créances purement chirographaires : la loi les place tous sur la même ligne; elle leur impose à tous la même obligation; elle comprend dans une règle commune tous les débiteurs des émigrés, a quelQUE TITRE QUE ce puisse être.

» A la loi du 8 avril 1792, a succédé celle du 2 septembre de la même année. Par cette seconde loi, les biens des émigrés ne sont plus seulement mis sous la main de la nation, ils sont déclarés acquis et confisqués à son profit; cependant les droits de leurs créan ciers sont réservés, notamment par les art. 4, 6 et 7; et en conséquence, l'art. 15 parle encore de la caisse duséquestre établie par la loi du 8 avril; il en parle comme d'un établissement qui doit subsister dans le nouvel ordre de choses; et l'art. 20 entrant dans le même sens, désigne expressément, sous le nom de séquestre général des biens des émigrés, l'administration de l'enregistrement et des domaines nationaux.

» Ainsi sous l'empire de la loi du 2 septembre, comme sous celui de la loi du 8 avril 1792, les débiteurs des émigrés n'ont pu se libérer qu'à la caisse du séquestre national; et nul créancier, même hypothécaire, des émigrés n'a pu en contraindre les débiteurs à payer entre ses mains.

» Vient ensuite la loi du 25 juillet 1793, et voici ce qu'elle porte, sect. 2, art. 11: Tous dépositaires publics ou particuliers, » tous débiteurs sans exception »(et par consé quent les débiteurs de créances hypothe quées comme les débiteurs de créances cédulaires), « seront tenus de déclarer, dans

» la huitaine de la publication de la présente » loi, dans chaque municipalité, les deniers, » sommes échues ou à échoir..... qu'ils auront »en leur possession.... ». L'art. 16 ajoute : Les dépositaires publics et particuliers, et » débiteurs... qui..... auront négligé de faire » lesdites déclarations, ou qui en auront fait » de fausses, seront contraints à la restitution des objets non déclarés, et à une amende » égale à la valeur desdits objets.... ».

» Et quel doit être l'effet de ces déclarations? C'est ce que va régler l'art. 17 : « Les » sommes déclarées en vertu des articles pré

cédens....., seront versées.... dans la caisse » des receveurs de l'enregistrement; et ce » nonobstant toutes oppositions de la part des » créanciers de chaque émigré, et sans y » préjudicier ». Voilà qui confirme, qui developpe bien clairement les conséquences que nous tirions tout à l'heure de l'art. 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des creanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni dispenser son débiteur de verser à la caisse du receveur de l'enregistrement, le montant de ce qu'il doit; mais ces oppositions n'en souffriront point pour cela : elles tiendront sur la somme que le receveur de l'enregistrement aura touchée. Preave évidente et sans réplique que le receveur de l'enregistrement touche pour le compte des créanciers opposans; preuve évidente et sans réplique que les créanciers opposans sont censes recevoir par les mains du receveur de l'enregistrement; preuve évidente et sans réplique enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains du receveur de l'enregistrement, est cense payer, non pas seulement, à la république, mais encore aux créanciers même opposans.

>> Et remarquons bien que ce que la loi dit des débiteurs, elle le dit aussi des dépositaires publics. Si donc le receveur des consignations n'avait pas eté forcé par la loi du 23 septembre suivant, de verser à la trésorerie nationale le prix de l'adjudication faite le 24 juillet à Jérémie Collineau, ce receveur aurait dù, après l'ordre arrêté le 3 nivose an 3, remettre à la caisse de la régie de l'enregistre ment la partie de ce prix qui a été reconnue appartenir à la succession de Jean-Simon Aved. La trésorerie nationale a donc succédé, en vertu de la loi du 23 septembre, à l'obligation que la loi du 25 juillet avait imposée au receveur des consignations. Elle a donc dù, comme elle l'a fait, remettre à la caisse de la régie de l'enregistrement la somme que le jugement d'ordre du 3 nivóse an 3 adjugcait à la république, du chef de Jean-Simon Aved, qu'elle représentait par droit de Confiscation.

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