Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

DE LA BRACHYGRAPHIE

DU MOYEN AGE,

ου

DES DIFFÉRENTS MODES D'ABRÉGER L'ÉCRITURE

USITÉS PAR LES GRAVEURS EN LETTRES,

LES SCRIBES ET LES COPISTES

DU Ve AU XVIe SIÈCLE.

Le désir ou plutôt le besoin de réduire l'écriture, soit pour lui faire occuper moins d'espace, soit pour en rendre l'exécution plus rapide, soit encore, comme l'ont pensé quelques-uns, pour dérober au vulgaire la connaissance de certains textes, fit imaginer chez les peuples les plus anciens divers systèmes abréviateurs. Ceux-ci, transmis de siècle en siècle, s'ils ne furent pas toujours régulièrement suivis, en firent naître d'autres, qui n'étaient souvent que d'ingénieuses combinaisons des premiers.

Les nombreuses abréviations qui surchargent les écritures du moyen âge, au point de les rendre souvent indéchiffrables, dérivent elles-mêmes des sigles, des notes de Tiron, des lettres monogrammatiques ou conjointes, des lettres enclavées et de quelques signes particuliers; tous modes abréviateurs romains introduits, avec l'écriture et

la langue latine, dans les Gaules, après la conquête de J. César, et qui tous s'y conservèrent pendant plusieurs siècles.

Les SIGLES, genre d'abréviation où les mots sont représentés par quelques-unes de leurs lettres constituantes, et souvent aussi par leur seule initiale, furent employés non seulement sur les monnaies et les inscriptions qui datent de la domination romaine, mais encore dans les inscriptions lapidaires et métalliques des premiers temps du moyen âge, où les copistes les utilisèrent même dans la transcription des manuscrits (1).

Les NOTES DE TIRON (2), sténographie composée de lettres tronquées et de signes dont l'exécution rapide permettait de suivre la parole, étaient plus spécialement usitées pour recueillir des discours, prendre des notes et obtenir de promptes transcriptions. Plusieurs diplômes de nos rois de la première race ont été écrits en notes tiro

(1) << Au moyen de ces sigles ou lettres initiales, disent les

Bénédictins diplomat stes, on écrivait les mots avec la plus grande célérité. Un ancien poete en relève ainsi les avantages:

Hic et erit felix scriptor, cui littera verbum est.

On fit usage de cette écriture abrégée tant dans les affaires publiques que particulières, dans les inscriptions et les manuscrits, dans les lois et les décrets, les discours et les lettres. Les magistrats et les jurisconsultes s'approprièrent un grand nombre de sigles qu'on appelle juridiques. » Puis ils citent le Virg le d'Asper de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, écrit tout en sigles, dont le premier vers commençait ainsi Tytire t. p. r. s. t. f.

(2) Ainsi appelées du nom d'un affranchi de Cicéron, qui avait porté au plus haut degré de perfect on ces notes dont l'invention est attribuée à Ennius.

niennes (1); on les réservait aussi pour de certains écrits qu'on voulait tenir secrets. L'usage de ces notes se soutint en France jusqu'au IX® siècle.

Quant aux LETTRES MONOGRAMMATIQUES ou conjointes, aux lettres enclavées, c'étaient moins des abréviations proprement dites qu'un moyen de resserrer l'écriture dans un petit espace. Les inscriptions métalliques et lapidaires du moyen âge contiennent beaucoup de ces lettres. (Voyez les Spécimens, page 106, et les Inscriptions représentées page 444, Nos II et III.)

Les SIGNES particuliers dont nous avons parlé ont été empruntés pour la plupart aux notes de Tiron. Les Romains s'en servaient pour représenter des nombres, des poids, des mesures, des particules et beaucoup de mots d'un usage fréquent.

Tous ces modes abréviateurs, sans parler encore des lettres renversées et retournées, furent, outre l'écriture ordinaire, d'un emploi constant et régulier dans les Gaules, pendant l'occupation romaine. Dès le moyen âge, et même bien après l'invasion des barbares et des Francs, qui apporta tant de modifications dans les usages romains, les graveurs en lettres, les scribes et les copistes se ser

(1) Dom Carpentier, dans son Alphabetum Tironianum, a publié 54 diplômes appartenant au règne de Louis le Débonnaire. a Les notes vulgairement appelées tironiennes furent cependant employées à transcrire des livres entiers, tels que les Psautiers de Strasbourg, de la Bibliothèque du Roi, estimé du Xe siècle, de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, beaucoup plus ancien, et celui de Saint-Remi de Reims. » (Les BB. Diplom) Voyez le Spécimen de ce genre d'écriture, page 112.

virent encore de ces divers modes d'abréger l'écriture. Mais l'obscurité ou l'équivoque causés par les sigles, déjà bannis pour cette raison des livres de droit par une loi de l'empereur Justinien (1), et la difficulté de lire et de pratiquer la sténographie tironienne comprenant plus de cinq mille notes, firent abandonner insensiblement ces moyens abréviateurs purement romains, qui d'ailleurs finissaient par ne plus répondre aux usages et aux formules d'une société qui s'était renouvelée sous l'influence du christianisme (2).

Aussi, bien avant l'entière exclusion de ces anciens systèmes, au IXe siècle, un grand nombre de copistes en étaient venus à faire usage de l'écriture pleine (3), en y introduisant quelques abréviations d'une interprétation facile. Ces abréviations, dues à d'ingénieuses combinaisons qu'avait fait imaginer l'emploi des sigles et des notes de Tiron, ne présentant plus d'obscurité ni d'équivoque, furent adoptées par la généralité des scribes et des moines copistes qui leur donnèrent beaucoup de vogue.

(1) En 525. Bien plus tard encore, en 863, l'empereur Basile ft défense d'employer dans le même cas ce genre d'abréviation.

(3) Au IIIe siècle, S. Cyprien, évêque de Carthage, avait déjà compris la nécessité d'augmenter les notes de Tiron de toutes celles qui convenaient à l'usage des Chrétiens. En effet, le langage théolo8 que avait des expressions et des formules particul.ères, que les abréviations romaines ne pouvaient rendre.

(3) Celle-ci n'avait pas cessé d'être cultivée malgré l'emploi de ces modes abréviateurs. « Quoique cette so te d'écriture abrégée, d sent les Diplom. BB., en parlant des notes de Tiron, fut à la mode, elle n'était ni assez commune, ni assez sûre, pour qu'on pút se passer de l'écritura ordinaire. »

« VorigeDoorgaan »