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en individus de différentes castes. Cette estimation, lorsqu'on la compare aux relations exagérées des ennemis des Espagnols qui ont voulu flétrir les lauriers de ceux-ci, par l'odieuse qualification d'exterminateurs des Américains, se concilie parfaitement avec le degré d'industrie et la quantité de subsistances que possédaient les nations qui occupaient anciennement cette contrée. Au fait, il est impossible de croire que depuis 1513, époque de la première expédition au Pérou, jusqu'à l'année 1517, que commença l'importation des nègres ' destinés à suppléer au défaut sensible de bras pour la culture des terres, on ait versé tant de sang, et sacrifié tant de victimes, uniquement pour le plaisir aussi insensé que barbare, de commettre des crimes et de

En 1510, Ferdinand-le-Catholique envoya, à ses propres frais, quelques nègres en Amérique; mais le privilége exclusif fut accordé, en 1516, à un particulier appelé Chevris. Celui-ci céda, pour la somme de trois mille ducats, ses droits à une compagnie de marchands génois qui, au commencement de l'année 1517, mirent à terre sur la côte de l'île de SaintDomingue, cinq cents africains måles et autant de femmes ; et ce fut là le premier débarquement de nègres.

que

détruire. Comme en même tems, il est certain les territoires où ne pénétrèrent point les Espagnols ne sont que des déserts immenses, où l'on ne trouve aucune trace d'habitation humaine, et que sous le gouvernement des incas, il n'y avait pas, dans tout le Pérou, excepté Cuzco, une seule place qui méritât le nom de ville, la justice exige qu'on détruise les fausses idées qui se sont répandues au sujet de la prétendue extermination de l'Amérique. Elle eût été épouvantable, si les calculs qui font monter à trois cent millions, le nombre des aborigènes, n'étaient pas dépourvus de toute vraisemblance. Toutefois, l'auteur qui les a donnés n'a pas été cru, Les écrivains qui différent le moins de lui, ne portent pas la population de toute l'Amérique et des îles qui en dépendent, à plus de cent millions d'individus; et cependant, ils s'écartent encore de la vérité, puisque les arithméticiens politiques qui ont traité ce sujet avec impartialité, n'ont donné qu'une population de quarante millions d'ames au Nouveau Monde, lorsqu'il fut découvert.

Les véritables causes du peu de population de l'Amérique, se trouvent dans le genre de

Riccioli.

vie auquel ses habitans primitifs étaient bornés. Leur existence dépendant principalement de la chasse et de la pêche, ils étaient dans une continuelle agitation, en même tems qu'ils manquaient de certains alimens favorables à la propagation de l'espèce humaine. Les guerres presque continuelles que se faisaient les différentes nations, les sacrifices de victimes humaines qu'offraient plusieurs d'entr'elles, les crimes si communs parmi quelques autres, l'insalubrité du climat, sur-tout dans les îles et dans les provinces qui avoisinent la ligne, et enfin l'ignorance des arts utiles, et principalement de ceux qui procurent les douceurs de la vie, concoururent à empêcher les hommes de se multiplier.

Le célèbre Linnée a remarqué que les rivières sont plus larges et plus étendues, à proportion du volume de leurs eaux, dans les contrées sauvages et sans culture, qu'elles ne le sont en des pays habités par des peuples civilisés. Le Pérou est une preuve de la justesse de cette observation. Il faut sans cesse y passer des ruisseaux et des torrens, ce qui gêne extrêmement les communications, vu qu'il n'y a que peu de ponts. Ceux qu'avaient construits les indigènes manquaient d'arches.

Les radeaux et les ponts de cordes suppléaient au défaut d'autres ponts, inconvénient que ne ressentaient pas infiniment des peuples qui n'avaient à se déplacer que pour porter leurs

tributs à Cuzco.

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Les causes secondaires dont nous venons de parler, jointes au vice inhérent du sol, ont arrêté les progrès de l'agriculture au Pérou. La nature, en lui prodiguant tous les métaux, l'a condamné à une sorte de stérilité, quant aux autres productions végétales. L'histoire des incas présente l'observation suivante : « Il n'y a que peu de bonnes terres au Pérou: « l'extrême rigueur du froid empêche le maïs « de croître dans le territoire de Callao, qui << a plus de cent cinquante lieues de circon«férence. Dans les vallées, la rareté de l'eau « est un obstacle insurmontable à la végéta<tion; et d'ailleurs, il y a plus de sept cents « lieues de côtes, dont le terrain est aride et « brûlé, où il ne pleut jamais, et que n'arrose « aucune rivière. » Telle est la manière dont s'est exprimé un des plus anciens historiens du Pérou.

• Garcilazzo.

CHAPITRE VIII.

Commerce intérieur du Pérou. - Exportations.

Le tems qui décide souverainement de tout ce qu'il est possible de faire, a démontré la justesse des observations que nous venons de rapporter; et dans le cours de près de trois siècles, il n'y a eu aucune augmentation dans les productions végétales du Pérou, Celles-ci cependant sont suffisantes pour les habitans. Les provinces se communiquent réciproquement les articles de consommation qui sur abondent dans les unes, tandis qu'ils manquent dans les autres. La balance de ce commerce, qui se fait à-la-fois et par terre et par mer, est en faveur de la vice-royauté de Lima; et à la fin de l'année 1789, elle était de 725,192 piastres. Elle varia peu les années suivantes. Les profits que cette même vice-royauté retira de l'exploitation de ses productions, dans les provinces de Buenos-Ayres, passèrent un million de piastres. On ne peut dire qu'elle fasse aucun commerce maritime avec ces provinces

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