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qui pût encore honorer la France, s'il eût été adopté; c'étoit d'offrir au roi l'asile de l'Amérique. Les Américains sont reconnoissans envers lui, disoit Payne, parce qu'il a favorisé leur indépendance. A ne considérer cette résolution que sous le point de vue républicain, c'étoit la seule qui pût affoiblir alors en France l'intérêt pour la royauté. Louis XVI n'avoit pas les talens qu'il faut pour reconquérir à main armée une couronne, et une situation' qui n'auroit point excité la pitié n'eût pas fait naître le dévouement. La mort que l'on donnoit au plus honnête homme de France, mais en même temps au moins redoutable, à celui qui, pour ainsi dire, ne s'étoit pas mêlé de son sort, ne pouvoit être qu'un horrible hommage que l'on rendoit encore à son ancienne grandeur. Il y auroit eu plus de républicanisme dans une résolution qui auroit montré moins de crainte et plus de justice.

Louis XVI ne refusa point, comme Charles I., de reconnoître le tribunal devant lequel il fut traduit, et répondit à toutes les questions qui lui furent adressées, avec une douceur inaltérable. Le président demandant à Louis XVI pourquoi il avoit rassemblé les troupes au château, le 10 août, il répondit: Le château

étoit menacé, toutes les autorités constituées l'ont vu, et, comme j'étois moi-même une autorité constituée, il étoit de mon devoir de me défendre. Quelle manière modeste et indifférente de parler de soi, et par quel éclat d'éloquence pourroit-on attendrir plus profondément!

M. de Malesherbes, ancien ministre du roi, se présenta comme son défenseur. Il étoit l'un des trois hommes d'état, lui, M. Turgot et M. Necker, qui avoient conseillé à Louis XVI l'adoption volontaire des principes de la liberté. Il fut forcé, de même que les deux autres, à renoncer à sa place, à cause de ses opinions dont les parlemens étoient ennemis ; et maintenant, malgré son âge avancé, il reparoissoit pour plaider la cause du roi en présence du peuple, comme jadis il avoit plaidé celle du peuple auprès du roi; mais le nouveau maître fut implacable.

Garat, alors ministre de la justice, et, dans des temps plus heureux pour lui, l'un des meilleurs écrivains de France; Garat, dis-je, a consigné dans ses mémoires particuliers que, lorsqu'il se vit réduit par sa funeste place à porter au roi la sentence qui le condamnoit à mort, le roi montra le calme le plus admirable.

en l'écoutant; une fois seulement il exprima par un geste son mépris et son indignation : c'est à l'article qui l'accusoit d'avoir voulu verser le sang du peuple françois. Sa conscience se révolta, lorsque tous ses autres sentimens étoient contenus. Le matin même de son exécution, le roi dit à l'un de ses serviteurs: Vous irez vers la reine; puis, se reprenant, il répéta: Vous irez vers ma femme. Il se soumettoit dans cet instant même à la privation de son rang, qui lui avoit été imposée par ses meurtriers. Sans doute il croyoit que la destinée, en toutes choses, exécute les desseins de Dieu sur ses créatures.

Le testament du roi fait connoître tout son caractère. La simplicité la plus touchante y règne: chaque mot est une vertu, et l'on y voit toutes les lumières qu'un esprit juste, dans de certaines bornes, et une bonté infinie peuvent inspirer. La condamnation de Louis XVI a tellement ému tous les cœurs, que la révolution pendant plusieurs années en a été comme maudite.

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BEAUCOUP de personnes ont attribué les désastres de la France à la foiblesse du caractère de Louis XVI, et l'on n'a cessé de répéter que sa condescendance pour les principes de la liberté a été l'une des causes essentielles de la révolution. Il me semble donc curieux de montrer à ceux qui se persuadent qu'il suffisoit en France, à cette époque, de tel ou tel homme pour tout prévenir, de telle ou telle résolution pour tout arrêter; il me semble curieux, dis-je, de leur montrer que la conduite de Charles Ier. a été, sous tous les rapports, l'opposé de celle de Louis XVI, et que pourtant deux systèmes contraires ont amené la même catastrophe : tant est invincible la force des révolutions dont l'opinion du grand nombre est la cause!

Jacques Ier., le père de Charles, disoit que l'on pouvoit juger la conduite des rois, puisque l'on se permettoit bien d'examiner les décrets de la Providence, mais que leur puissance ne pouvoit pas plus étre mise en doute que celle

de Dieu. Charles Ier. avoit été élevé dans ces maximes, et il regardoit comme une mesure aussi condamnable qu'impolitique toute concession faite par l'autorité royale. Louis XVI, cent cinquante ans plus tard, étoit modifié par son siècle; la doctrine de l'obéissance passive qui subsistoit encore en Angleterre du temps de Charles Ier., n'étoit plus soutenue, même par le clergé de France en 1789. Le parlement anglois avoit existé de tout temps; et, quoiqu'il ne fût pas irrévocablement décidé que son consentement fût nécessaire pour l'impôt, cependant on avoit coutume de le lui demander. Mais, comme il accordoit des subsides pour plusieurs années, le roi d'Angleterre n'étoit pas, comme aujourd'hui, dans l'obligation de le rassembler tous les ans, et très-souvent on prolongeoit les

impôts, sans que sans que le renouvellement en fût prononcé par les représentans du peuple. Toutefois le parlement protestoit toujours contre cet abus; la querelle des communes avec Charles Ier. commença sur ce terrain. On lui reprocha deux impôts qu'il percevoit sans le consentement de la nation. Irrité de ce reproche, il ordonna, d'après le droit constitutionnel qu'il en avoit, que le parlement fût dissous; et il resta douze ans sans en convoquer un autre : interruption

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