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et qu'on accordait aux étrangers un certain délai pour se mettre, si je puis dire, au courant des règlements locaux (Merlin, Rép., t. VI, v° Ignorance, § 1, p. 3).

Mais cette doctrine peut-elle être suivie encore aujourd'hui ?

Pour la négative, on peut dire : 1° que les textes de la loi ne comportent aucune distinction de ce genre (comp. art. 3, Cod. Nap.; 161, Cod. d'Instr. crim.; 65, Cod. pén.); 2° que l'intérêt général s'y oppose; on n'en finirait pas, en effet, avec toutes ces questions d'ignorance particulière et de bonne foi personnelle, en matière de police. C'est par suite de cette nécessité publique que, dans les matières de douanes, de droits réunis, d'enregistrement, la contravention même, c'est-à-dire le fait seul de la contravention est puni, sans que la question d'intention puisse même être soulevée (loi du 9 floréal an vii; Merlin, Rép., v° Excuse, no 8, t. IV; Cass., 22 juin 1842, Admin. des douanes, Dev., 1842, I, 605). C'est enfin par application du même principe, que la Cour suprême a plusieurs fois cassé des jugements de police, qui avaient excusé des contraventions commises dans une commune par des individus étrangers à cette commune (Cass., 3 fév. 1827, Min. pub., D., 1829, I, 384; Cass., 15 févr. 1828, Min. pub., D., 1828, I, 133; voy. toutefois, Cass., 23 avril 1842, Deram, Dev., 1842, I, 878).

Il me paraît résulter de ces principes et de ces autorités qu'en effet on ne pourrait pas admettre, en cette matière, l'excuse déduite uniquement de la bonne foi, de l'absence d'intention; un jugement ainsi motivé ne serait pas bien rendu; mais pourtant, je ne crois pas qu'on puisse aller jusqu'à dire qu'on ne devrait pas admettre le moyen fondé sur l'impossibilité. A l'impossible nul n'est tenu! c'est là une règle de raison, de justice, de nécessité; aussi, la Cour de cassation elle-même admet-elle que T'empêchement de force majeure fait exception à la culpabilité, même en matière de police (art. 64, Cod. pén.; Bulletin

criminel, 1835, no 4f6; 1840, n° 226; 1841, no 112). Nous pensons que ces applications autoriseraient, suivant les circonstances, à considérer comme résultant d'un cas de force majeure et d'impossibilité, la contravention commise par un étranger nouvellement arrivé, si le juge, en effet, déclarait que, dans l'état des faits, il n'avait pas pu connaître le règlement de police.

Il faut ajouter, sur cette question, l'article 4 du décret du 5 novembre 1870, qui est ainsi conçu:

« Les tribunaux et les autorités administratives et militaires pourront, selon les circonstances, accueillir l'exception d'ignorance alléguée par les contrevenants, si la contravention a eu lieu dans le délai de trois jours francs, à partir de la promulgation. »

74. Si les lois de police obligent tous les individus, étrangers ou Français, qui se trouvent en France, réciproquement elles n'obligent pas, en général, ceux, étrangers ou même Français, qui se trouvent en pays étranger; car elles ont principalement pour but l'ordre intérieur et la police territoriale du pays (Cass., 26 septemb. 1839, Bertin, Dev., 1840, I, 64).

Toutefois, cette proposition est susceptible d'importantes modifications (voy. à cet égard art. 5, 6, 7, Cod. d'Instr. crim.; et le décret du 23 octobre 1811).

No 2 et 3. Lois concernant les biens, ou statut réel; lois concernant les personnes, ou statut personnel (article 3, 2o et 3° p.).

75.

Quels sont les caractères distinctifs de la loi réelle et de la loi personnelle?

Quels en sont les effets?

76. — § 1. — Caractères distinctifs des lois réelles et des lois personnelles.

La loi est réelle, lorsqu'elle a pour objet prédominant et essentiel les biens eux-mêmes; lorsqu'elle a principalement en vue les biens, et ne s'occupe des personnes

qu'accessoirement; lorsqu'elle n'agit sur les personnes qu'à titre de moyen, si je puis dire ainsi, pour atteindre le but final, qu'elle se propose à l'égard des biens, pour en régler, pour en diriger la transmission.

La loi est certainement personnelle, au contraire lorsqu'elle a pour objet prédominant et essentiel la personne elle-même, la personne tout entière en quelque sorte, c'est-à-dire son état et sa capacité, d'une manière générale, indéterminée, absolue; lorsqu'elle ne s'occupe des biens qu'accessoirement, qu'à titre de moyen, pouratteindre le but final, qu'elle se propose à l'égard de la personne, dont elle veut, avant tout, réglementer l'état dans toute son étendue; c'est la définition même de notre article 3, lorsqu'il dit qu'elle concerne l'état et la capacité des personnes; et la Cour de cassation a très-nettement aussi exprimé ce caractère, en décidant que le statut est personnel, lorsqu'il règle directement et principalement la capacité générale et absolue des personnes (comp. Cass., 4 mars 1826, Aubert, D., 1829, I, 166; d'Aguesseau, 54° plaidoyer).

Ajoutons, avec Prévôt de La Jannès, que lorsqu'un statut est la modification d'un autre, il en suit la nature; et que, dès lors, la loi même, qui ne règle que partiellement et sous un certain rapport, la capacité de la personne, n'en est pas moins aussi une loi personnelle (comp. Cass., 19 avril 1852, de la Roche-Aymon, Dev., 1852, I, 801). 77.D'après cela, on ne doit pas hésiter à consi

dérer:

1° Comme réelles, les lois, par exemple, qui déterminent les différents droits dont les biens peuvent être l'objet (art. 544, etc.); les biens qui sont ou ne sont pas susceptibles d'hypothèque (art. 2218); la manière dont l'hypothèque peut être constituée (art. 2127); dont l'expropriation peut être poursuivie (art. 673, Cod. de Procéd.), etc. (comp. Cass., 13 juill. 1829, de Broglie, Sirey, 1829, I, 325);

2o Comme personnelles, au contraire, les lois qui déterminent les conditions de la nationalité (art. 10); du

mariage (art. 444); de la minorité ou de la majorité (art. 388, 488); les causes, les conditions et les effets de l'interdiction (art. 489), etc. (comp. Limoges, 22 juin 1828, Reyjolas, Sirey, 1829, II, 20).

Dans tous ces cas, en effet, on reconnaît, à première vue, que la loi s'occupe tantôt des choses, tantôt des personnes, d'une manière non pas seulement principale et prédominante, mais exclusive et absolue.

78.-C'est lorsque les personnes se trouvent de plus près en rapport avec les choses, que la distinction devient difficile et la nuance parfois très-délicate, à tel point que certains auteurs avaient autrefois proposé de déclarer des statuts mixtes.

Mais les effets si différents, si contraires même des deux statuts, ne permettent pas cette alliance, cette confusion; il faut donc choisir; et c'est dans le caractère prédominant de chaque loi, dans l'objet essentiel, de sa préoccupation, dans son but final, en un mot, qu'il faut puiser les moyens de distinction (comp. Cass., 2 mai 1825, Maconnex, Sirey, 1825, I, 223; Felix et Demangeat, Traité du droit international privé, t. I, no 21).

79.- La loi sur les successions ab intestat est-elle réelle ou personnelle?

Un homme vient de mourir; que va devenir son patrimoine? où ses biens iront-ils ? telle est ici la seule question à résoudre;

Or, cette question, quel est son objet, quel est son but immédiat et essentiel? ce sont les biens eux-mêmes; c'est la dévolution, c'est la transmission des biens qui est l'objet dominant de la préoccupation de la loi, le but final qu'elle se propose;

Donc, la loi sur la transmission des biens ab intestat est réelle.

80. Il faut en dire autant, par conséquent, des lois sur la réserve et la quotité de biens disponible.

Un homme meurt, laissant un ou deux enfants; a-t-il

pu disposer à titre gratuit de toute sa fortune? Quelle est cette question? eh! mon Dieu, c'est la même que tout à l'heure, pour la partie seulement, et non plus pour le tout la question de savoir ce que deviendront les biens de cet homme; à qui ils seront attribués, au donataire, au légataire ou aux enfants, et dans quelle proportion? Même question, dis-je; car la réserve est une partie de la succession ab intestat, une partie indisponible, que la loi elle-même transmet impérativement à certains héritiers.

Qu'on n'objecte pas que le père, ne pouvant disposer que d'une certaine portion de ses biens, est incapable de disposer du reste, et que dès lors la loi est personnelle. Le père n'est pas incapable. Sa capacité personnelle n'est, sous ce rapport, nullement affectée. Le but final de la loi est tout autre, tout différent; ce sont les biens eux-mêmes, qu'elle a en vue; c'est sur les biens essentiellement qu'elle agit; c'est la transmission de ces biens aux enfants qu'elle se propose; c'est uniquement pour atteindre ce but, qu'elle empêche le maintien ou l'exécution des libéralités, qui détourneraient cette portion de biens de la route qu'elle leur a tracée. Mais elle n'a pas pour but d'altérer, et elle n'altère pas, en effet, pour cela, la capacité personnelle du père; il est si peu incapable et ses dispositions sont si peu nulles, que, dans le cas de prédécès de ses enfants, les libéralités excessives qu'il aurait faites, même de leur vivant, seront maintenues. Donc la loi n'avait pas pour but de rendre le père incapable ni la disposition nulle; car, si tel eût été son but essentiel, son but final, apparemment elle aurait bien trouvé le moyen de l'atteindre! (Comp. notre Traité des Donations entre-vifs et des Testaments, t. II, no 193; Paris, 7 janv. 1870, Willemin, Dev., 1870, II, 97.)

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81. Je pense aussi qu'il faut considérer comme réelle la loi qui détermine la part de l'enfant naturel reconnu, dans la succession de ses père et mère.

C'est encore et toujours la même question: Que de

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