Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

gratuit qui fe trouve dans le choix que Dieu fait de certains hommes, pour leur donner la grace, fans avoir égard à leurs œuvres & à leurs difpofitions precedentes. Au contraire il femble infinuer que Dieu ne faifant qu'appeller les hommes à sa connoiffance, ce font eux qui fe determinent & qui fe choififfent eux mêmes pour aller à Dieu.

Mais le terme d'election n'a point toutes ces incommodités, premierement il n'est point equivoque & ne fe prend jamais pour l'action de Dieu fur les reprouvés; & nefe peut prendre en ce fens, car on ne fçauroit jamais appeller election, l'action par laquelle Dieu appelle d'une maniere generale tous les hommes, puisque ce mot fignifie clairement preference, & feparation du general. Secondement ce terme d'election emporte neceffairement en foy une action interne. Car on ne dira jamais que Dieu choifit, & elit les hommes, fi tant eft qu'il ne fait que leur adreffer une vocation externe & generale à tous, tant à ceux qui doivent fuivre qu'à ceux qui doivent refifter. [Choix & election fuppofe toûjours une action de feparation. Or cette action de separation ne peut-être une action externe,car ce qu'il ya d'externe dans la vocation est commun à tous. Ainfi pour accomplir & executer un choix, il faut neceffairement que Dieu agiffe interieurement dans l'un,& n'agiffe pas dans l'autre. Enfin le terme d'election exprime parfaitement le gratuit

& la liberté qui eft dans la conversion par laquelle Dieu attire les hommes à Dieu. Car cette converfion fe faifant par election, il faut que ce foit par l'election de Dieu, qui prend les hommes, ou par l'election des hommes qui prennent Dieu. Ce n'eft point par cette derniere election que l'homme eft converti à Dieu, carjamais l'Ecriture n'appelle cela election de l'homme. Mais toufiours election fimplement, on election de Dieu. C'est donc

l'election & le choix de Dieu. Si l'hom. me choififfoit Dieu par fon libre arbitre, ce ne feroit pas Dieu qui choisiroit, ce feroit l'homme. Et l'election de Dieu ne feroit pas proprement une election,parce qu'elle ne feroit pas gratuite; car toute election fignifie une libre preference de l'un à l'autre. Or fi les hommes prevenoyent Dieu il n'y auroit rien d'étonnant que Dieu-les preferaft. Et Cette preference ne feroit point libre. Je conclus donc que cette action par laquelle Dieu aprés avoit fait addreffer une invitation generale à tous les pêcheurs, choifit quelques-uns d'entr'eux dans le temps, pour donner la grace prevevante, eft affés importante dans l'œuvre du falut pour avoir fon terme particulier, & qu'entre tous les termes celuy d'election, cft le plus propre qu'on auroit pu choisir.

Mais enfin pour decider cet article, je foûtiens que jamais homme non prevenu, ne doutera que ce ne foit là le vray fens auquel

l'Ecriture prend le mot d'elus & d'élection quand il aura examiné avec attention tous les endroits où ces mots font employés: faifons une courte reveuë de tous ces endroits.

Si nous remontons un peu haut & que nous cherchions l'ufage du vieu Teftament, nous trouverons que felon l'ufage du mot bachar, qui fignifie élire, & de bachour qui fignifie élu, ces mots ne fe prennent jamais pour un choix fait dés l'eternité, mais toûjours pour un choix fait dans le tems. Mais comme je penfe que ce ne peut pas être une affaire conteftée, ce feroit perdre fon tems que de la prouver. On avoue pareillement que dans le Nouveau Teftament élire, élus & élection fe prennent pour un choix fait dans le tems, & beaucoup plus fouvent qu'autrement. En ce fens il eft dit de Jefus Chrift, * qu'il appella fes Difciples, & en élut douze qu'il nomma auffi Apôtres. ** Qu'il avoit donné mandement aux Apotres par le Saint Efprit, lefquels il avoit élus Et dans le méme chapitre du Livre des Actes, les Difciples voulant fubftituer un Apôtre à la place de Judas, ils en prefenterent deux, & dirent en priant, verf. 24. Seigneur qui Connois les coeurs de tous montre lequel des deux tu as élu. Je ne fçai s'il peut venir dans. l'efprit de quelqu'un que là il foit parlé d'une election eternelle. C'eft pourquoi quand l'Apôtre Saint Paul eft appellé,

*Luc. 6.13.

[ocr errors]

** Act. 1.2.

vaiffeau

vaiffeau d'élection on inftrument d'elite. Je ne pente pas qu'on puiffe douter qu'il ne foit appellé ainfi par rapport à ce que Dieu l'avoit feparé dans le temps pour aller prefcher l'Evangile aux Gentils, & c'eft cela mefme que S. Paul dit de luy mefme dans la Preface de l'Epiftre aux Romains; Mis à part pour annoncer l'Evangile de Dieu. Ces paffages où il eft parlé de l'election des Difciples pour eftre Apoftres, mettent auffi hors de doute le fens de ces paroles de Jefus Christ; * Ce n'eft pas vous qui m'avés élu, mais c'eft moy qui vous ai élus du monde. Et ces autres du chap.5. du méme Evangile verf. 70. Ne vous ai-je pas élus vous douze & l'un de vous eft Diable? Et encore ces autres du treiziéme chap. v. 18. Je ne parle point de vous tous,car je fais ceux que j'ay élus. Car il eft clair qu'il fait allufion dans ces divers lieux à ce qu'il avoit fait quand il eft dit de luy : Et il en élut douze qu'il nomma auffi Apôtres. Au méme fens il eft dit, que les Fréres élurent Etienne, Perfonnage plein de foy, & fix autres avec luy pour les premiers Diacres. Je ne pense pas non plus qu'on puiffe douter que ce ne foit au méme fens que S. Pierre difoit au 15. des Actes, verf. 7. Vous favés que dés long tems Dieu a élu d'entre nous que les Gentils oüiffent par ma bouche la parole de l'Evangile. Et dans le méme chapitre. Et il fembla bon aux An

* Marc 15. & 19.

H

Or

ciens à toute l'Eglife d'envoyer en Antioche gens élus d'entr'eux. verf. 25. Nous avons efté d'avis d'envoyer vers vous des perfonnages que nous avons élus. Je ne crois pas non plus qu'on faffe difficulté de nous paffer pour la fignification commune ces textes du 17. ch. de l'Epiftre aux Cor. Dieu a élu les chofes folles de ce monde, &c. & Dieu a élu les chofes viles de ce monde. En un mot il eft certain que le mot de choifir & d'élire dans leur naturelle fignification, ne fignifient qu'un acte de feparation, qui fe fait dans le tems. pour tirer un mot de fa naturelle fignification, pour le transporter à une autre qui luy eft tout-à-fait eftrangere, il faut avoir de bons garans & de bonnes preuves. Ainfi l'on ne doit pas donner aux mots d'élire & d'élection, une fignification qui fignifie decret eternel, fans y eftre obligé par la neceffité du bon fens qu'on doit conferver: tellement que fi l'on peut conferver à l'Ecriture un fens jufte, orthodoxe & conforme à l'analogie de la foy, en confervant aux mots d'élire & d'élection leur fignification naturelle, on m'avoüera que cela fera beaucoup plus raifonnable. Or c'eft cela que nous allons voir, que dans tous les lieux où l'on pretend qu'il eft parlé d'élection, il eft beaucoup plus commode de l'entendre de cette feparation que Dieu fait par fa grace efficace & par fon Efprit, dans le tems, & quand il appelle fes Enfans du milieu du monde. Mais

« VorigeDoorgaan »