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de la diftance où ils fe trouvent, cette connoiffance de la hauteur des terreins eft néceffaire à l'Hiftoire Naturelle; & fans elle il eft impoffible de former une théorie de la terre fondée fur les faits, & qui puifle fatisfaire les hommes éclairés: mais pour ce dernier objet il faudroit multiplier les nivellemens à un point que les difficultés des dif férentes méthodes, connues jufqu'ici, rendent prefque impraticable.

ÉLOGE de M. DE VOLTAIRE, par M. Paliffot, in-8°. A Londres, & fe trouve à Paris, chez Jean-François Baftien, Libraire, rue du Petit-Lion.

Ce titre promet plus qu'il ne donne. L'Auteur de cette Brochure eût beaucoup mieux fait de l'intituler: Précis fur M. de Voltaire & fur fes Ouvrages. Le ton de fimplicité qu'il a pris dans fon ftyle, le peu d'anecdotes qu'il a recueillies, le peu d'étendue des réAlexions dans lefquelles il eft entré, font autant de raifons qui juftifient pleinement ce que nous venons de dire. On en va juger d'abord par l'exorde.

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La gloire de M. de Voltaire n'eft pas » refferrée dans les feules limites de fa patrie. C'est à l'Europe entière, attentive » aux premiers jugemens qui vont être por»tés fur cet Écrivain célèbre; c'est à notre

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fiécle & à la postérité toujours juste, mais

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» toujours févère, que nous ferons refpon» fables de ce que nous allons écrire; & → nous aimons à nous pénétrer de cette vé"rité, pour nous défendre ici de toute paffion, de tout enthoufiafme. Ecartons également, & les éloges donnés par l'adula» tion, & les fatyres plus prodiguées encore » par la haine; & tâchons de faifir avec impartialité ce qui doit caractériser à jamais » cet homme rare, cet homme fingulier, " &, pour parler d'avance le langage de nos » defcendans, cet homme unique. »

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L'Auteur paffe rapidement fur les premières difpofitions de l'enfance de M. de Voltaire, ou plutôt il n'en dit rien; mais il compte, avec raifon, parmi les avantages qui ont contribué à en faire un homme extraordinaire, cette heureufe organisation, capable de fuffire à l'application la plus » continue, & qui, fans être affujétie aux variations du temps, ne fe délaffoit du travail que par le travail même. »

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Malgré une conftitution très-délicate en apparence, aucun homme n'a été à la fois plus précoce que M. de Voltaire, & n'a joui d'une vieilleffe plus faine & plus robufte. Aucun n'a commencé fa carrière d'une manière plus brillante, & ne l'a terminée avec plus de gloire. Non-feulement il a fuffi à des travaux Littéraires qui auroient donné matière à trente réputations diftinguées mais à des foins qui fembloïent incompa

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tibles avec cette paffion prédominante pour l'étude. »

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Ici l'Auteur entre dans quelques détails hiftoriques, & rappelle quelques faits connus. Puis il continue.

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"Le moral dans cet homme fingulier n'offrit pas moins de phénomènes que le phyfique. C'est à l'âge de 18 ans qu'il fit fa première Tragédie. C'étoit un prodige » qu'un pareil debut; mais par un prodige plus grand encore, il méditoit dès-lors le feul ouvrage de génie qui n'eût pas été » tenté dans le fiécle de Louis XIV, ou du » moins qui l'avoit été fi malheureusement, qu'il ne nous refte de tous ces effais aucun veftige. Il conçut le projet de la Hen»riade, & la France fut étonnée de devoir » fon premier Poëme épique à un Auteur » de vingt-quatre ans. Le même a été l'Hif»torien de Pierre-le-Grand, de Charles XII,

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de Louis XIV, & celui de toutes les Na» tions depuis Charlemagne jufqu'à nos jours. Le même a étendu la carrière de » l'Hiftoire, trop refferrée avant lui dans les détails de la politique & de l'ambition des Princes, comme s'il étoit de la » destinée des peuples de leur être facrifiés » en tout, & jufques dans les annales du » monde. Il a fait fentir le premier cette efpèce d'outrage fait au genre- humain; »& ce que les Hiftoriens avoient jufqu'alors » le plus négligé, l'influence de l'opinion fur » les malheurs de la terre, les lois, les ufa

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»ges, les mœurs, les progrès des Sciences » & des Arts, devinrent le principal objet de »fes recherches. Cette révolution de l'Hiftoire, perfectionnée par la Philofophie, » eft peut-être une des chofes qui lui a donné le plus de droits à l'admiration de » fes contemporains & à la reconnoiffance » de la postérité.

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Ces idées fur l'Hiftoire font également profondes & judicieufes; &, n'en déplaife à M. Paliffor, nous obferverons que toutes les fois qu'il penfe & s'énonce ainfi, il est vraiment Philofophe. Il s'en faut de beaucoup qu'il ait aufli bien apprécié les Romans de M. de Voltaire, qu'il fe contente d'appeler un nouveau genre de Romans. Cette phr fe nous paroît un peu mefquine. On ne pouvoit parler plus vaguement des productions les plus originales peut-être de ce Génie auffi fingulier qu'univerfel, qui a embrallé avec un égal fuccès tous les genres de la Littérature, depuis le Poëme épique jufqu'au Madrigal, depuis les hautes Sciences jufqu'à l'Hiftoire ; & qui, par un prodige plus furprenant encore, a fu fe créer dans chacun de ces genres une manière neuve, & qui n'appartient qu'à lui feul. Un Écrivain qui a autant d'agrément & de fineffe dans l'efprit que M. Paliffot, devoit fe complaire à caractérifer ce nouveau genre de Romans, où la raifon la plus fage femble avoir pris plaifir à s'habiller en mafque, & où la morale, pour être préfentée fous les traits de l'enjou

ment, n'en eft que plus profonde & plus inftructive.

Le paragraphe qui concerne les Tragédies eft un morceau de difcuflion excellent, bien motivé, bien écrit. Nous voudrions pouvoir le tranfcrire; mais les bornes que nous prefcrit la nouvelle forme de ce Journal, ne nous le permettent pas. Nous ne pouvons néanmoins nous empêcher d'observer que le Panégyrifte de M. de Voltaire ne le place qu'au fecond rang, en donnant à Racine le premier. Quoique nous n'ignorions pas que cette opinion foit celle de quelques gens de Lettres, & même de gens de Lettres diftingués, nous nous hafardons à croire que la fupériorité de Racine n'eft rien moins que prouvée. Il nous femble qu'un parallèle raifonné des Pièces de ces deux grands Poëtes, feroit le moyen le plus sûr de décider la question. Or, nous demandons fi l'amour maternel dans Mérope n'eft pas au moins auffi touchant que dans Andromaque, & s'il n'eft pas d'ailleurs bien autrement déve loppé ? Nous demandons laquelle de la rivalité de Nemours & de Vendôme, ou de celle de Pharnace & de Xiphares eft la plus intereffante? Nous demandons enfin quelle eft la Pièce de l'Euripide François qui peut être mife en parallèle avec Zaïre? Si Racine eft le Poëte des ames tendres & fenfibles, M. de Voltaire eft à la fois le Poëte des cœurs paffionnés & celui des Philofophes.

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